Sauvage ou élevage ?
Ou   " ma conception de l’aquariophilie "
Un des grands sujets de débat aquariophile actuel est de savoir s'il est " aquariophilement correct " ou " plus sain " de maintenir des poissons d'élevage ou des poissons sauvages.
Souvent la question en reste là d'ailleurs, et certains campent sur leurs positions sans essayer d'aller voir plus loin que le bout de leur nez, et sans être capables d’argumenter réellement dans un sens ou dans l’autre
.
Tout d'abord il semble utile de définir ces deux termes car ils sont souvent mal employés.
Un poisson sauvage est un poisson prélevé dans le milieu naturel.
Un poisson d'élevage est issu de reproduction en captivité. CQFD

C'est simple et pourtant certains restreignent le terme "élevage" aux formes créées artificiellement et ne ressemblant plus aux formes naturelles.
Un poisson d'élevage peut aussi être un poisson correspondant parfaitement au type du poisson observé en milieu naturel. Ainsi, un poisson issu d'un couple sauvage (on dit F1) n'a normalement rien perdu des qualités de ses géniteurs.
De même un poisson issu de deux F1 (il est F2) de souches différentes (mais pas d'espèces ou de formes chromatiques différentes) a le même potentiel génétique qu'un poisson sauvage.

Qu’est ce que l’aquariophilie ?

Avant de commencer à développer les différents points, il me semble intéressant de répondre à cette question : " qu’est ce que l’aquariophilie ? ". On verra que, selon les réponses que l’on va donner, la suite peut être totalement différente.
Là, je prends mon " Petit Robert " et¼. j’en tombe sur le c** : " élevage des poissons dans un but décoratif ". Bon¼ l’article est fini. Si je me contente de cette définition totalement restrictive et simpliste, il n’y a rien à ajouter, on peut élever n’importe quoi du moment que " c’est beau ".
Allons plus loin dans l’analyse de la phrase. "  Élevage : action d’élever (les animaux domestiques ou utiles), art de les faire naître, de veiller à leur développement, leur entretien, leur reproduction " (Le Petit Robert). Çà c’est plus intéressant et on en déduit donc que le but de l’aquariophilie est la reproduction en captivité des poissons, reproduction liée à l’aspect esthétique.

Évidemment, ma définition personnelle de l’aquariophile est un peu différente et je peux ainsi la résumer : " élevage des animaux et plantes aquatiques dans un but décoratif et d’observation des comportements dans le respect des animaux (et des plantes !) et de leurs conditions naturelles de vie ".
Là, si l’on réfléchit bien, on ne parle pas tout à fait de la même chose : exit les boules à poissons rouges, les pondoirs à guppettes, exit les amphores sur fond de colonnes grecques ; exit le Titanic coulé à côté du squelette qui fait des bulles. Mais aussi exit tous les poissons dont les comportements, reproducteurs notamment, ont été dénaturés par des générations de captivité ; exit tous les poissons difformes, colorisés, trafiqués, tous les candidats à mon " Musée des Horreurs ", Corydoras vanille- fraise, " Chanda " fluos, Parrot Cichlid la liste est longue, désespérément longue, de plus en plus longue...
Voilà *ma* conception de l’aquariophilie (et celle de bien d’autres), basée sur la qualité et non sur la médiocrité. Malheureusement elle va à l’encontre du courant actuel qui se contente de ne voir dans l’aquariophilie qu’un aspect purement esthétique (souvent douteux).
Essayez de demander à votre commerçant local de vous fournir des Guppies ou Platies " naturels "¼ Tentative vouée à l’échec... Ou alors il faut qu’il les commande spécialement pour vous. Pourquoi ? La réponse fuse " ça ne se vend pas ". Eh non¼ ce qui se vend se sont tous les trucs à queue de voilelyrefluosballoon. Ca c’est rentable, donc on en fait venir par paquets. Mais le pauvre hurluberlu qui veut des Guppies " naturels " il peut toujours aller voir ailleurs après être passé pour un doux illuminé. Dans les grandes surfaces aquariophiles, c’est encore pire puisqu’il faut faire du chiffre à tout prix¼ vendre, vendre, vendre. Ne demandez pas de pièce détachée pour votre pompe " Duschmol ", ça n’existe pas et on ne va pas se décarcasser pour vous en trouver, par contre, on peut vous en vendre une neuve.
Vendre à tout prix est aussi d’ailleurs le seul but de quelques pseudo-aquariophiles qui ne voient notre passion que comme un moyen d’arrondir leurs fins de mois. Je rejette également cette conception mercantile. L’aquariophilie à mon sens doit rester un loisir et un loisir ça ne rapporte pas d’argent, ça en coûte.

L’aquariophilie telle que je la définis ce n’est donc pas ce qu’on vous propose actuellement mais, malheureusement, le commun des " aquariophiles " n’a souvent pas le choix et doit subir la loi qu’on lui impose. Bien heureux celui qui saura s’en sortir en contactant les associations aquariophiles locales, beaucoup plus riches en enseignements que les vendeurs sous-doués et sous-formés (sauf exception) des grandes surfaces.
Je sais que ma conception n’est pas celle de tout le monde, mais le problème est que c’est toujours dans le même sens : on vous " impose des choix " en vous empêchant d’avoir les vôtres, du fait de la difficulté à vous procurer ce qui, éventuellement, vous ferait envie. C’est une forme de dictature.
Pourquoi ne pas éduquer le public de façon à lui donner le goût des animaux naturels (ce qui ne veut pas dire " prélevés dans la nature ", mais " ressemblant à s’y méprendre aux formes sauvages ")? S’il y avait davantage de vrais amateurs, on ne pourrait plus entendre le lancinant " ça ne se vend pas " et le choix pourrait se faire dans un sens ET dans l’autre. Mais les vrais amateurs sont peu nombreux, les autres ne sont que des " possesseurs de trucs qui flottent dans l’eau ".

Ce qui est encore plus grave actuellement c’est que si un commerçant met en vente une espèce assez rare, il ne la vend pas parce qu’elle n’entre pas dans les " normes aquariophiles ". Je prends un exemple, près de chez moi une animalerie propose actuellement de magnifiques Limia. Aucun succès. Par contre, les guppies se vendent les uns derrière les autres. Pourquoi ? Parce qu’il n’y a pas eu d’éducation en faveur des formes naturelles. Résultat, le commerce ne met à la disposition des amateurs guère plus d’une quarantaine d’espèces " courantes ". Le commerce français est désespérément figé sur ces quelques espèces vues et re-vues et surtout il ne faut pas en sortir puisque " ça ne se vend pas ". Cercle vicieux : ça ne se vend pas donc je n’en commande pas, mais comme je n’en commande pas personne n’en demande, etc,..etc..
Essayez de trouver des Apistogramma autres que les agassizii, cacatuoides de Singapour, et pourtant le genre compte plus de 50 espèces¼ C’est à se décourager de faire l’élevage de ce genre de poissons si on tient à avoir des sujets de qualité.

Pourquoi préférer le " naturel " ?

(D’abord parce que si on le chasse, il revient au galop J)

Apportons une précision. Le " naturel " ne concerne pas que l’aspect extérieur, esthétique, du poisson mais également son aspect comportemental. Un poisson peut avoir conservé l’aspect naturel de ses ancêtres (forme, coloration) mais avoir perdu une grande partie de leurs comportements (reproducteur notamment). Ainsi, des sujets élevés sur plusieurs générations en incubation artificielle perdent leur instinct de garde des jeunes. Que ce soit pour les pondeurs sur substrat ou les incubateurs buccaux, c’est souvent la cause des échecs de reproduction. Il faut donc considérer le poisson non plus seulement sous son aspect esthétique mais comme une entité englobant les aspects extérieur et comportemental.
Préférer le " naturel " c’est donc vouloir pouvoir observer toute la richesse des comportements sans qu’ils soient dénaturés.
D’un point de vue purement esthétique, beaucoup disent que les formes artificielles sont souvent beaucoup plus colorées que les formes naturelles. Bien entendu, l’aspect esthétique est quelque chose de parfaitement subjectif puisque certains considéreront qu’un Discus Pigeon Blood est beau alors que d’autres (dont je fais partie) ne le considéreront que comme une horreur dégénérée ; à l’inverse les premiers ne verront aucun attrait à un Discus " naturel " alors que les seconds lui trouveront toutes les qualités. Subjectivité donc : il suffit de savoir dans quel camp on se place. Mais comme vous êtes là, vous êtes dans le bon camp !

Cessons donc de ne voir que l’aspect purement décoratif de l’aquarium pour le considérer comme un élément privilégié de l’observation de la vie aquatique. A partir de ce moment, le poisson n’est plus un élément parmi d’autres mais l’acteur principal de la vie de l’aquarium : il est là pour nous apprendre sa vie, ses mœurs. Dans ces conditions, les formes artificielles ne se justifient plus.
On nous dit aussi qu’il y a plus de variété dans les formes artificielles. C’est méconnaître le milieu naturel. Avec plus de 600 espèces, dont beaucoup présentent une multitude de formes chromatiques, le Lac Malawi peut offrir aux plus acharnés des " esthéticiens " de quoi se régaler pendant des années. Quant au Lac Tanganyika, avec sa multitude de comportements reproducteurs, une vie entière est nécessaire pour tous les observer et les étudier.

Voilà donc pourquoi, à mon avis, le " naturel " est beaucoup plus riche d’enseignement que l’artificiel et se contenter de l’aspect purement esthétique de l’aquariophilie c’est lui retirer son plus grand attrait.
Bon, je suis sorti un peu du cadre de l’article mais il le fallait pour bien comprendre certaines choses

Le "sauvage" pour ou contre ?

Revenons à nos moutons
Nous partirons donc du principe que vous êtes un vrai aquariophile qui n’a pas particulièrement envie de se contenter du tout-venant, que vous voulez de beaux poissons correspondant à ce qui se trouve dans le milieu naturel. Les autres, de toute façon, ne fréquentent pas ce site.
Il existe des aquariophiles qui sont 100% "sauvages"¼ pardon¼ "pro sauvage" ;-))) (il y en a aussi des sauvages mais c'est une autre histoire).
Ce n'est forcément par pur snobisme, ni pour avoir le plaisir de gonfler les pectoraux en disant " moi je n'ai que des sauvages " ! Il y a aussi des aquariophiles consciencieux qui élèvent parfaitement ce genre de poissons dans le but de les faire se reproduire et ainsi diffuser largement l'espèce. Nous y reviendrons.

Les arguments " anti sauvages "
Ils sont au nombre de trois :
1/ Prélever dans la Nature c’est détruire la Nature.
2/ Les poissons sauvages sont chers.
3/ Les poissons sauvages sont plus fragiles.

Les arguments " pro-sauvages " :
On obtient des poissons de meilleure qualité que dans les élevages, on est sûr d’avoir des souches pures, non trafiquées et non dégénérées par les élevages intensifs. Évidemment cet argument ne tient que si l’on s’attache à élever des poissons " naturels " et il tombe automatiquement à partir du moment où on ne considère l’aquariophilie que comme un loisir " décoratif " où seul l’aspect esthétique de l’aquarium compte (mais ce type d’ " aquariophile " ne fréquente pas ce site !). Les " pro-sauvages " affirment également que les poissons prélevés en milieu naturel sont plus colorés que les poissons d’élevage (même F1). Cela est souvent vrai pour les espèces du Malawi fraîchement importées, ça l’est beaucoup moins pour les ectodini du Lac Tanganyika par exemple.

L’élevage, pour ou contre ?
A l’exception des rares hyper-snobs précités, très peu d’aquariophiles sont fondamentalement anti- élevage.
En fait, tout aquariophile sensé devrait y être favorable. Mais tout dépend du type d’élevage !
Dans la mesure où nous partons du principe que nous voulons avoir des poissons de qualité, nous exclurons forcément tous les poissons issus d’élevages intensifs, notamment ceux du sud-est asiatique qui ne produisent plus que des poissons à l’identité de plus en plus douteuse, aux couleurs de moins en moins attrayantes (je ne parle pas des " trucs " hyper sélectionnés fluos) et aux comportements fortement atténués par des générations d’élevage artificiel ainsi que les élevages d’Europe de l’est qui prennent le même chemin. Malheureusement c’est à eux que fait appel le commerce généraliste via quelques grossistes, parce que " c’est moins cher à l’achat donc on peut s’en mettre un peu plus dans la poche à la vente"

Il existe pourtant de petits éleveurs, professionnels ou amateurs, qui produisent de très beaux poissons, simplement parce qu’ils n’ont pas un souci de rentabilité forcenée.
Il existe également dans les pays tropicaux des éleveurs travaillant correctement en grands bassins (je pense notamment à " Fishes of Burundi "), même si certaines souches mériteraient d’être régénérées par du matériel sauvage. Il existe également ce type d’élevage en Côte d’Ivoire mais la qualité est moindre car les poissons fournis sont apparemment " boostés " pour grossir le plus vite possible et sont souvent un peu obèses. Ce type d’élevage local est toutefois à encourager si la qualité y est bonne et à condition que ces producteurs ne cèdent pas au mercantilisme en fabriquant également des souches trafiquées comme ce qu'on a pu voir pour Fishes of Burundi dans la revue Cichlid News avec des Tropheus "Kipili albinos" (CN de 10/1999) ou des duboisi dégénérés (CN de Juillet 2001).
Les associations aquariophiles nationales telles que l’AFC, l’AFV, la CIL ou le KCF offrent également la possibilité, par des bourses d’échanges, des petites annonces, etc., d’obtenir des poissons correspondant aux critères recherchés, et de plus, les prix sont très attractifs.
Dans la mesure où les poissons produits par des éleveurs sont de bonne qualité, il n’y a aucune raison de ne pas être favorable à ces poissons, sauf par snobisme pur et dur.
Mais un élevage de " propre " doit être posé sur une base solide, à savoir des reproducteurs d’excellente qualité d’où la nécessité de, au moins de temps en temps, régénérer les souches d’élevage par du sang neuf, donc des sujets sauvages, prélevés dans la nature...

Les arguments " anti-sauvage " tiennent-ils la route ?

Le premier argument était que les prélèvements en milieu naturel détruisent la Nature.
A mon avis c’est certainement le moins valable. Et même, en allant plus loin, on peut montrer que les prélèvements en milieu naturel peuvent permettre une préservation des biotopes.

Quant aux deux autres arguments : prix et fragilité, je dirai simplement qu’un poisson sauvage se " mérite ", et nécessite une bonne expérience aquariophile et les soins les plus attentifs de son propriétaire. Il n’est donc pas destiné au " premier venu ". A partir de là, quiconque met le prix qu’il veut s’il lui semble justifié...
Quant à la fragilité, puisqu’il est destiné à un amateur sérieux et expérimenté, celui-ci lui accordera tous les soins nécessaires et il ne sera pas plus, voire moins, fragile qu’un poisson bourré d’antibiotiques issu d’un élevage intensif. D’ailleurs on remarque que cet argument de fragilité est souvent inversé, et que certains affirment que les sujets d’élevages sont plus fragiles que les sauvages. En fait les deux sont vrais. Ce qu’il faut savoir c’est qu’un poisson sauvage peut introduire un parasite dans votre bac ; à l’inverse, il peut parfaitement être contaminé par vos poissons, porteurs sains depuis longtemps, d’une maladie qui lui est inconnue.
Si on prend la précaution de déparasiter tout sujet sauvage et de lui faire subir une quarantaine conséquente, on limite une bonne partie des risques.

Destruction de la Nature ?

Le poisson actuellement le plus pêché à des fins aquariophiles est le cardinalis (Paracheirodon axelrodi) - 10 millions d’exemplaires par an - car son élevage n’est absolument pas rentable. Il est démontré que cette pêche ne met absolument pas l’espèce en danger.
Dans les grands lacs africains Malawi et Tanganyika, il existe quelques exportateurs qui ne prélèvent que les poissons qui leur sont demandés. S’ils doivent expédier 100 XY, ils prélèvent 100 XY. Accordons-nous un gros pourcentage de perte et le prélèvement sera effectivement de 200 poissons : que représentent ces 200 individus par rapport aux milliers de spécimens pêchés tous les jours à des fins alimentaires (eh oui, un autochtone, ça mange aussi, et en plus, comme il est chez lui, il a le droit de manger *ses* poissons, même si la brochette de Cyphos vous fait un peu mal au cœur !). Seulement là il y a un petit problème, c’est que la population humaine augmente mais les lacs ne s’agrandissent pas. Les prélèvements à but alimentaire sont donc de plus en plus importants, réalisés avec des filets aux mailles de plus en plus fines. Et les espèces disparaissent progressivement, particulièrement les sabulicoles, qui sont plus faciles à capturer (Xenotilapia flavipinnis " Nyanza Lac " aurait presque disparu).

Sur un site web (http://dailynews.yahoo.com/h/nm/20010614/sc/environment_fish_ornamental_dc_1.html) on peut lire la chose suivante : " L'aquariophilie est une grosse affaire. Les exportations mondiales de poissons d'ornement s'élèvent à 178 millions de $ en 1998. 90 % sont constitués de poissons d'eau douce dont 90 % sont produits en captivité. Alors que 100 millions de tonnes de poissons marins sont prélevées pour l'alimentation, seulement 70 à 100 tonnes sont prélevées pour l'aquariophilie."
Cela nous donne à réfléchir sur l'impact exact des prélèvements naturels à des fins aquariophiles.

Autre problème de taille : la destruction des biotopes. Que dire de la déforestation qui met en péril les rivières d’Amérique mais aussi les grands lacs ? La catastrophe écologique du Lac Victoria est davantage due à la surpopulation, la déforestation et donc à la pollution humaine qu’à l’introduction de la Perche du Nil (même si celle-ci n’est pas étrangère à la disparition de certaines espèces pélagiques).
En Amazonie ou en Amérique Centrale c’est la catastrophe : on coupe, on brûle, on creuse pour chercher de l’or et on balance tous les résidus dans les rivières en faisant tout crever (les orpailleurs utilisent du mercure, beurk !).
Que représente le prélèvement de quelques Apistogramma ou Tetras par rapport à ces catastrophes écologiques ? Rien, sinon la possibilité de, peut-être, sauver des espèces.
[Exemple des Zoogoneticus et autres Xiphos jessaiplukoi qui n’existent plus dans leurs mares Mexicaines et prolifèrent en captivité ? ?]
Donc les prélèvements à des fins aquariophiles ne constituent pas un danger pour la faune à partir du moment, bien entendu, où ces prélèvements sont soigneusement gérés dans le respect des stocks et des biotopes. De toute évidence les pêches au cyanure ne peuvent qu’être condamnées car elles détruisent non seulement les poissons pêchés mais également tout le biotope ce qui est particulièrement grave (voir le lien vers le site pré-cité) de même que les pratiques qui m’ont été rapportées il y a une dizaine d’années par Christian Cozilis qui, revenant du Cameroun, avait constaté que des aquariophiles allemands passés dans la région de Moliwe (de mémoire) avaient vidé le ruisseau de toutes ses pierres et racines pour attraper plus facilement les Pelvicachromis taeniatus.
Le respect de la Nature c'est aussi de ne pas relâcher n'importe où des poissons pêchés en surnombre ou relâcher dans des endroits plus accessibles des espèces qui seront ainsi plus facilement diffusées. Ce dernier cas est bien connu au Malawi avec quelques espèces de Likoma introduites à Cape Maclear à l'époque de Peter Davies. Fort heureusement cela ne semble pas avoir eu d'impact sur les espèces locales. De même, il m'a été rapporté que, au Tanganyika, une variété de Tropheus a été trouvée dans un endroit où elle n'avait absolument rien à faire... à proximité d'un exportateur !!! Nous ne pouvons également que condamner le fait de relâcher à n'importe quel endroit des poissons pêchés en surnombre ou ne correspondant tout simplement pas au sexe désiré. Si 100 Tropheus sont pêchés et qu'il y a 60 mâles... cela fait, pour un exportateur, 20 mâles de trop pour le nombre de femelles... où vont-ils ? Malheureusement ils ne sont pas toujours sacrifiés.
Il n’y a là aucun respect de l’environnement et ça ne correspond absolument pas à mon éthique de l’aquariophilie ni à celle de tous les aquariophiles responsables.

Les poissons " sauvages ", pour préserver la Nature.
Rêvons un peu !
Et si, par exemple, le monde aquariophile ne voulait plus que des poissons naturels ! Que se passerait-il ?
On pourrait envisager que des élevages s’installent à proximité des lieux de pêche ce qui leur permettrait d’avoir assez facilement la matière première. De telles tentatives ont déjà vu le jour (voir plus haut) comme au Malawi où, malheureusement, faute d’aquariophiles expérimentés pour gérer l’élevage, la tentative de Grant est tombée plus ou moins à l’eau (si j’ose dire !) ; ce qui ne veut pas dire qu’avec des conditions de travail améliorées cela ne soit pas viable en complément des prélèvements naturels et pour certaines espèces rares.
On pourrait aussi rêver en se disant que, comme ils ont besoin de cette matière première, les éleveurs locaux n’ont pas envie de voir leurs rivières détruites par quelques forestiers ou chercheurs d’or.
On pourrait imaginer qu’ainsi ils préservent leur environnement !
On pourrait aussi envisager que, bénéficiant de cette source de revenus, ils n’aient plus la nécessité de cultiver la coca !
On pourrait rêver que les pêcheurs des grands lacs se rendent compte que vendre du poisson vivant c’est, peut-être, plus rentable que de le faire sécher au soleil en leur procurant suffisamment d’argent pour acheter du riz.
La page web pré-citée nous informe sur le sujet : " le prix moyen pour l'alimentation varie entre 14 500 et 16 500 $ la tonne alors que  le cours du poisson d'ornement est de l'ordre de 1,8 millions $ par tonne !!"
On pourrait ainsi envisager que tous ces gens aient envie de créer des réserves naturelles pour préserver leur environnement ce qui attirerait quelques riches occidentaux en vacances.
On pourrait aussi envisager que tout cela s’applique également aux plantes comme les Orchidées.
Ou pourrait rêver que l’homme, plutôt que de ne considérer la campagne que sous son aspect actuel de monoculture, prenne conscience de la biodiversité des espaces laissés dans leur état naturel : des milliers d’espèces animales et végétales vivant dans une parfaite harmonie.
Malheureusement ce n’est pas ce que nous proposent les animaleries et jardineries actuelles en se limitant à quelques dizaines d’espèces.
Certains prétendent que l’élevage en captivité peut permettre la réintroduction d’espèces disparues dans le milieu naturel. Je crois cela totalement utopique parce que si des espèces disparaissent c’est, avant tout, en raison de la destruction des biotopes. Or un biotope ne se limite pas à une ou deux espèces, c’est un enchevêtrement complexe de centaines d’espèces animales et végétales. On peut sauver une ou deux espèces en les maintenant en captivité mais ne rêvons pas trop.

" I have a dream " (Martin Luther King)

Conclusion

Sauvage ou élevage ? Je pense avoir essayé de donner à chacun les moyens d’une réflexion personnelle. Je pense aussi que mon avis a transpiré au fil de ces pages.
Mais le gros problème actuel n’est pas de répondre à la question " Sauvage ou Elevage " mais " naturel ou trafiqué ". C’est un vaste problème d’éducation de chacun. Tout le monde connaît mon point de vue sur le sujet. J’espère simplement que ces pages permettront à quelques-uns d’avoir envie d’essayer le " naturel " plutôt que les succédanés, permettant ainsi une plus large ouverture de l’aquariophilie par un arrêt de la dictature actuelle du commerce de bas de gamme.
C’est aussi un moyen de préserver la Nature simplement parce qu’on a envie de la voir rester dans son état originel.

Autres articles

Sommaire