Le matériel
:
Disons le tout net : un téléphone,
c’est fait pour téléphoner, par pour photographier. Même
s’il peut occasionnellement vous dépanner pour tirer le portrait
de votre petit dernier, vous n’en sortirez jamais une œuvre d’art
et pour la photo de poissons, vous n’obtiendrez qu’une photo très
floue.
Il vous faudra donc choisir
un appareil photo.
Oublions les APN (Appareil
Photo Numérique) compacts car, même s’ils sortent des photos
de paysages ou des portraits très honorables, ils ne font pas l’affaire
pour l’aquariophilie, ne serait-ce que par le manque de puissance de leur
flash et sa proximité avec l’axe de l’objectif. On peut malgré
tout parfois sortir quelques photos convenables mais qui ne répondront
pas aux exigences d’un œil un peu averti. Car la photo doit avant tout
être faite d’exigences qualitatives.
Nous opterons donc pour un
APN réflex. Peu importe la marque, peu importe le modèle,
à une condition : qu’il puisse être possible de ne pas fonctionner
en mode automatique mais en mode manuel. Ceci est primordial car,
comme nous le verrons plus loin, nous utiliserons essentiellement ce mode.
Il faudra donc aussi apprendre à lire le mode d’emploi de l’appareil.
Combien de millions de pixels
? Tout dépend de ce que l’on veut faire ! Pour des photos «
web » cinq millions suffisent largement, si on veut faire une affiche
de 5 mètres de long il faudra prévoir beaucoup plus. De plus
un grand nombre de pixels permet de réaliser des recadrages plus
fins si on le souhaite (« crop »). Actuellement, les appareils
d’entrée de gamme fournissent au moins 16 millions de pixels, ce
qui est très largement suffisant.
S’il faut un APN, celui-ci
n’est rien sans un objectif. Le meilleur des APN équipé d’un
cul de bouteille ne fera jamais de belles photos. Plus l’appareil sera
sophistiqué, plus il méritera un objectif de qualité.Les
zooms standards, même s’ils font des photos honnêtes, ne résistent
pas à des photos plus poussées, il faudra donc mettre
le prix dans l’objectif.
Celui-ci se caractérise
par différents paramètres :
La focale. Pour résumer,
c’est la capacité à éloigner ou à rapprocher
le sujet. Une focale standard qui donne une photo correspondant à
ce que l’on voit à l’œil nu est de 35 mm avec un APN (50 mm avec
les anciens argentiques). Tout ce qui est en dessous éloigne le
sujet, c’est un grand angle ; tout ce qui est au-dessus rapproche le sujet,
c’est un téléobjectif. Quand la focale peut varier, c’est
un zoom (18-135 ou 25-80 pour des « classiques »).
L’objectif se caractérise
aussi par son ouverture maximale (f/3,5 par exemple). Plus ce chiffre est
petit, plus l’ouverture est grande, faisant entrer davantage de lumière.
Mais ce chiffre est aussi inversement proportionnel au prix. Un objectif
ouvrant à f/1,8 coûte beaucoup plus cher, à focale
égale, que celui qui ouvre à 2,8.
Une autre caractéristique
est la distance de prise de vue minimale. Pour nous, elle devra être
assez faible de façon à prendre les poissons d’assez près.
Les objectifs « macro » permettent de prendre de très
près, à une distance de quelques centimètres, ce qui
peut être utile pour les petites espèces, mais pas indispensable
dans la plupart des cas. Evidemment, cette distance minimale joue aussi
sur le prix de l’objectif.
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Pour les petites espèces
ou pour les portraits, un objectif macro est indispensable (Ici un 105
mm macro) |
Mais l’appareil ne fait pas
tout. Ce qui fait une bonne photo c’est avant tout la lumière.
Il nous faudra donc de la
lumière, beaucoup de lumière. J’expliquerai plus loin pourquoi.
La lumière d’un aquarium
est souvent insuffisante et ne permet pas d’obtenir une qualité
optimale ; il faudra notamment penser à régler la balance
des blancs en manuel sinon on risque d’avoir une forte dominante jaunâtre.
Il faudra donc une source annexe, un flash, qui donne une lumière
proche du naturel.
Le flash intégré
à l’APN est très insuffisant car son nombre guide (NG= sa
puissance) est faible, dépassant rarement 20, de plus il est proche
de l’axe de l’objectif et il se reflète dans la rétine des
poissons, donnant un œil blanc ; souvent il se reflète dans la vitre,
provoquant un grand halo.
Ces différents inconvénients
font qu’il est préférable de s’équiper d’un flash
annexe de bonne puissance (NG de 40 à 50). Il est possible d’avoir
également un flash dissocié de l’APN, se déclenchant
par une cellule commandée par le flash intégré. Ceci
permet de placer le flash au- dessus du bac et donne un aspect plus naturel
par une lumière venant du dessus. Je n’ai jamais réellement
réussi à piloter mon ancien flash de cette manière
et comme le nouveau n’offre pas cette possibilité, je m’abstiendrai
donc de m’étendre sur le sujet pour me contenter des explications
liées à une prise de vue plus classique avec le flash placé
au-dessus de l’APN.
Matériel annexe non
indispensable mais parfois utile : un pied, un déclencheur souple
ou télécommande, un diffuseur de flash.
Que la lumière
soit
Voilà, vous avez votre
appareil flambant neuf apporté par le Père Noël ou Saint
Valentin et vous vous préparez donc à prendre vos premières
photos de poissons. Les ennuis commencent !
Vous avez sorti le flash
intégré et vous voyez son joli reflet dans la vitre du bac,
sans parler parfois de l’image de l’objectif à l’intérieur
du bac lui-même. En plus les photos sont floues. Pourtant vous avez
mis le prix mais rien n’y fait.
Pourquoi ? Parce que vous
pensez que faire une photo de poisson se fait comme une photo de belle-maman.
Vous avez un APN qui gère tout, tout est automatique, c’est super
avec mamie mais pas avec les poissons.
Il faut donc quelques bases
techniques. Donc commencer à savoir à quoi correspondent
les divers paramètres de l’appareil et de l’objectif et, surtout,
savoir les gérer.
Passons rapidement sur la
distance de prise de vue, elle dépendra de la focale de votre objectif
et de la taille du poisson (100 mm macro c’est super pour un apisto, ça
va être très gênant avec un Cichla. Mais ça,
c’est facile à régler avec un (bon) zoom standard.
Le gros paramètre
à gérer va être la lumière et je vais tenter
de vous expliquer pourquoi.
L’exposition d’une photo
(la quantité de lumière qu’elle nécessite) dépend
de deux facteurs : l’ouverture de l’objectif (plus l’ouverture est grande
– chiffre faible – plus la lumière entre, c’est logique !) Donc
un objectif ouvert à f/11 va laisser entrer beaucoup moins de lumière
qu’à f/5,6.
Si je veux que la photo
reçoive suffisamment de lumière, il faudra donc augmenter
le temps d’exposition, c’est le deuxième paramètre. Je peux
également jouer sur un autre paramètre qui est la sensibilité
(ISO). Les APN modernes permettent d’avoir une très haute sensibilité
(12800 ISO par ex.), mais ceci joue sur la qualité de la photo.
Plus on va mettre une sensibilité élevée, plus on
aura une photo ayant du grain. Ce n’est pas très important si on
la passe simplement sur un petit écran ou si c’est pour mettre une
petite photo sur le web mais pour un agrandissement de qualité
c’est très problématique. Un réglage entre 200 et
400 ISO est parfait pour une bonne finesse, on peut aller sans trop de
dégâts, avec un bon appareil équipé d’un capteur
de qualité, jusqu’à 1000 ISO, au-delà le grain commence
à être présent.
Un exemple sur une fleur
de cactus (affichage en taille réelle des pixels) sur laquelle on
voit bien la différence de "piqué", de gauche à droite
:
100 iso, 800 iso, 12
800 iso , 25 600 iso
Donc, premier point : ne
pas se mettre en réglage automatique des ISO.
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Dans les aquariums
publics où le flash est souvent interdit on peut malgré tout
réussir des photos honnêtes avec un objectif bien lumineux
et grâce aux capteurs modernes permettant de « monter les iso
» sans trop de dégâts.
Il convient toutefois de
bien penser à régler la balance des blancs pour compenser
les dominantes provoquées par l’éclairage artificiel.
Ce type de photo avec un
éclairage par le haut donne souvent un aspect esthétique
plus intéressant, et plus naturel, qu'avec un éclairage par
éclair de flash horizontal. |
La vitesse d’obturation :
plus elle est lente (1/60 seconde par exemple), plus le sujet aura des
chances d’être flou. De plus, on conseille toujours, pour éviter
le flou de bougé, de ne pas avoir une vitesse dont le nombre est
inférieur à la distance focale de l’objectif (pas en-dessous
du 1/100ème de seconde pour un 100 mm par ex). Comme nous devrons
utiliser un flash, il faudra tenir compte de la vitesse de synchronisation
de ce flash (souvent jusqu’au 1/200ème de seconde avec les appareils
d’entrée de gamme).
Lors des réglages
en « tout auto » cette vitesse est réglée fréquemment
au 1/60, donc on oubliera le « tout auto ».
Une vitesse d’obturation
au 1/125 convient parfaitement.
Il nous reste l’ouverture
du diaphragme. Celle-ci est primordiale pour gérer la profondeur
de champ.
C’est quoi la PDC ? C’est
la zone nette située entre la zone proche floue et la zone éloignée
floue.
Il est important que cette
profondeur de champ soit la plus grande possible afin d’obtenir un poisson
qui soit le plus net possible sur l’intégralité de son corps.
A défaut, l’œil doit toujours être net.
Cette PDC dépend
de deux facteurs :
-La distance : plus elle
est faible, plus la PDC est faible (à ouverture égale), pouvant
même être réduite à quelques millimètres.
-L’ouverture : plus celle-ci
est importante (chiffre bas – 2.8 par exemple) plus la PDC est courte.
On aura donc tout intérêt à opter pour une ouverture
assez faible (f/11 par ex).
Nous avons donc notre APN
réglé de la façon suivante : ISO entre 200 et 400
; vitesse entre 1/100 et 1/200, ouverture f/11 au moins. Evidemment, si
vous espérez qu’il fera cela tout seul en automatique, vous rêvez
! C’est à vous d’effectuer ces réglages en mode manuel,
d’où l’intérêt d’avoir lu le mode d’emploi de votre
appareil.
Mais malgré cela les
photos ne seront pas réussies, elles seront noires, simplement parce
que vous manquez de lumière ! C’est logique : grande vitesse et
petite ouverture laissent peu de lumière passer au travers de l’objectif.
D’où l’intérêt du flash. Les flashs et APN modernes
fonctionnent en mode TTL (Through The Lens) ce qui signifie que la lumière
émise par le flash est captée via l’objectif et gérée
par l’APN de façon à éclairer de manière optimale,
c’est ainsi que le flash peut être utilisé en plein jour et
au soleil pour atténuer des ombres par exemple. Dans notre
cas, le flash sera donc forcé par l’APN pour exposer correctement
une photo qui serait normalement très sombre. Certains flashs peuvent
également être utilisés en mode manuel ou un peu forcés
en cas de photos répétitivement trop sombres ou trop claires.
Plus votre flash sera puissant
(NG élevé) plus la lumière émise pourra être
forte (lapalissade !) donc plus vous pourrez jouer sur les paramètres
permettant d’augmenter la PDC. Avec un petit flash, vous aurez des photos
bien exposées à f/8, avec un très puissant vous pourrez
aller jusqu’à f/22, donc une plus grande PDC utile notamment pour
les photos prises de près en macro.
Le problème du flash
au dessus de l’APN est qu’il provoque une ombre portée pouvant être
disgracieuse. Elle sera d’autant plus visible que le poisson sera proche
du substrat.
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Pour atténuer
cette ombre, un deuxième flash déporté au-dessus du
bac est utile.
On peut également
utiliser un gros diffuseur de lumière qui se positionne devant le
flash.
Ce diffuseur à un
autre avantage : lors de prises de vue en macro de très près,
l’éclair du flash passe souvent derrière le sujet. Alors
que, avec le diffuseur, la lumière est mieux répartie et
éclaire correctement les sujets proches.
<==== Ombre portée
très visible
|
La lumière, ce n’est
pas que son intensité, c’est aussi sa mesure par l’APN. Les appareils
actuels permettent de mesurer différemment la lumière : soit
sur l’intégralité de l’image, soit sur une zone centrale,
soit sur le point central.
Si la mesure sur l’ensemble
de l’image convient souvent bien, il peut parfois être utile d’effectuer
des mesures sur la zone centrale, c’est notamment le cas des poissons argentés
sur fond sombre. Dans le cas d’une mesure de lumière sur l’ensemble
de l’image on obtient une « moyenne » donc un poisson surexposé
(trop blanc) ; il faut alors prévoir une mesure centrale de la lumière,
ce qui donnera un poisson correctement exposé sur un fond qui sera
un peu plus sombre. On obtiendra le résultat inverse dans le cas
d’un poisson sombre sur fond très clair.
Quel format de photo
?
Les APN permettent d’enregistrer
les photos sous deux formats : JPG et RAW. Quelle est la différence
?
Le format RAW (tout comme
le TIFF) comptabilise chaque pixel (point) de la photo alors que le format
JPG calcule des zones de couleurs identiques et leur attribue un «
code », la photo est compressée. La taille de ces zones
dépend du taux de compression. A chaque enregistrement de la même
photo, on perd ainsi un peu de qualité, de finesse. Le format RAW
est donc plus intéressant si on veut retoucher une photo sans perte
de qualité mais il prend beaucoup plus de volume sur les disques
durs et les cartes mémoire (plus de 20 Mo par photo par ex.) et
nécessite un travail sur chaque photo pour le convertir. De toute
manière, on s’efforcera toujours de conserver les fichiers initiaux.
Pour une utilisation standard
des photos (Web, revue type RFC par ex.) la qualité JPG est largement
suffisante en prenant soin de bien régler l’APN sur un enregistrement
en grande taille et fin des photos. Les cartes numériques actuelles
permettent de réaliser plusieurs centaines de photos (nous sommes
bien loin des vielles pellicules 36 poses !) et donc laisse le libre choix
de faire de multiples tests.
Mais nous n’avons pas
encore pris de photo !
Vous devez donc maintenant
avoir toutes les cartes en main pour prendre vos photos. Il reste à
le faire. Pour cela il y a encore quelques « réglages ».
Le bac doit être préparé,
l’eau propre, les vitres nettoyées ; c’est fou comme la moindre
petite algue, la moindre petite particule peut vous pourrir une belle
photo.
Il faudra prévoir
d’assombrir la pièce car sinon le moindre reflet se voit ou alors
on se colle à la vitre et les poissons n’apprécient pas toujours.
La prise de vue : La question
qui se pose souvent est celle du reflet du flash dans la vitre frontale
(voire même postérieure) du bac.
C’est un problème
qui se règle facilement en ne mettant pas l’objectif perpendiculaire
à la vitre, on lui donne un léger angle latéral, pas
trop important car sinon on est confronté à des problèmes
de diffraction de la lumière.
De plus, plus le flash sera
éloigné de l’axe de l’objectif et celui-ci proche de la vitre
frontale, moins le reflet sera possible. De même, avec un grand angle,
on captera facilement le reflet, quasiment pas avec un téléobjectif.
Donc en résumé : prendre d’assez près avec un léger
angle et un flash bien décalé.
Et faire une belle photo
? La photographie ne se limite pas forcément à prendre le
poisson de profil de façon à le montrer dans un but «
informatif ». Une belle photo doit avoir un « plus »
artistique.
Prévoir de ne pas
coller la bouche du poisson sur le bord de la photo, le poisson doit avoir
un peu d’espace devant lui. Il est mieux qu’il avance vers le photographe
plutôt qu’il s’en éloigne. Si l’attitude est particulière
(bâillement, incubation, prise de gueule, etc.) l’intérêt
n’en sera encore que plus grand et c’est souvent ce qui fait la différence
entre une belle photo et une excellente photo.
Et après les
photos ?
Il est bien loin le temps
de l’argentique où une photo prise était définitive.
Grâce au numérique il est très facile de corriger des
petits défauts : retirer une tache disgracieuse, recadrer un peu,
etc. On peut même éclaircir une photo un peu sous-exposée,
par contre il est beaucoup plus difficile d’améliorer une photo
surexposée. Tout cela peut se faire simplement avec des programmes
souvent gratuits qui deviennent indispensables en photographie numérique.
Il ne faut quand même
pas non plus trop compter sur les programmes de retouche, ils aident certes
mais, à moins d’y passer des heures, ils ne feront pas de miracle
sur une photo vraiment loupée.
Il ne faut jamais hésiter
à prendre de nombreuses photos du même sujet, même si
on n’en conserve finalement que quelques-unes. Mais on n’oubliera
jamais de toujours conserver les meilleures photos originales sur plusieurs
supports (Personnellement j'ai plusieurs disques durs externes et des sauvegardes
sur DVD, on n'est jamais trop prudent car un disque dur se plante plus
facilement qu'un classeur de diapos ne se perd !)
Bonne chance dans vos travaux
photographiques
Un grand merci à Christian
Piednoir et Patrick Tawil pour la relecture du texte
Complément (avril 2018) :
Ci-dessous
quelques essais de photos sans flash (Canon Eos 70D objectif canon
100mm 2.8 macro IS USM) le bac fait 60 cm de haut et est équipé de 4
tubes néons de 36 watts
Mode "priorité vitesse" vitesse au 125eme
Ouverture auto 5.6,
ISO en automatique donc allant de 8000 à 12000
Mesure spot (mesure de la lumière sur le centre de l'image).
Balance des blancs en auto
C'est intéressant notamment pour les deux Melanotaenia qui
ont tendance à trop prendre le flash. Par contre il y a énormément de
déchet étant donnée la grande ouverture, donc la faible profondeur de
champ. Les images sont exploitables pour le web mais pas plus.
Afin d'augmenter la profondeur de champ j'ai également effectué quelques tests en mode manuel
Vitesse 125éme
Ouverture 9.5 (attention de ne pas trop fermer le diaphragme car les photos seraient trop sous-exposées.
Iso auto (12800)
Prise de vue en rafale et mesure spot.

Le résultat est intéressant mais peut nécesiter quelques retouches de photos un peu sous-exposées

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