La maintenance des M'bunas (2)

* L'aquarium à m'bunas:

Voici au moins 18 ans, nous avons lu dans une revue aquariophile un article intitulé: "quelques Cichlidés nains, joyaux des lacs est-africains", dans lequel il était question de quelques espèces de m'bunas. Il ne viendrait maintenant à l'idée de personne de traiter un m'buna de "Cichlidé nain", nous mesurons ainsi les progrès accomplis dans leur connaissance. Donc pas de Cichlidés nains dans le lac Malawi, cela signifie qu'il n'est pas question de maintenir des m'bunas dans de petits aquariums. Nous pensons qu'un volume de 200 litres constitue un minimum, qui ne devra être accordé qu'à très peu d'espèces particulièrement calmes et introduites en nombre limité (2 à 3 trios adultes). Disons qu'une bonne base de maintenance sera obtenue dans un bac de 500 litres permettant l'introduction d'un plus grand nombre de sujets. Il convient de savoir qu'une surpopulation légère est souvent un facteur de réussite car elle permet de diminuer l'agressivité. La base habituellement conseillée pour les Cichlidés est de 3 à 4 litres d'eau par centimètre de poisson adulte, on pourra donc "serrer" un peu plus, mais avec modération (il est toujours possible de mettre 30 m'bunas dans un bac de 200 litres sans décor, mais est-ce bien sérieux !).
 
Afin d'imiter au mieux le milieu naturel, le décor sera constitué d'amas rocheux, en conséquence, il sera préférable de disposer d'un aquarium assez large de façon à avoir une plus grande impression de profondeur, ainsi qu'une plus grande stabilité du décor. Si possible, le décor rocheux sera divisé en deux ou trois zones séparées par une petite plage de sable, ceci permet de mieux diviser les territoires. Du point de vue esthétique, il est toujours préférable d'avoir une certaine homogénéité dans la roche - forme et couleur. Des pièces de bois, bien que très peu utilisées chez ces poissons, sont tout à fait conformes au biotope de certaines espèces (Pseudotropheus sp. "acei" par ex.). 

Bien entendu, dans le cas de racines de tourbière, il conviendra de choisir des pièces ayant "de la bouteille", c.-à-d. plusieurs années d'aquarium derrière elles, de façon à ce qu'elles ne contiennent plus aucune trace d'acide humique, ce qui provoquerait une baisse du pH. Dans le cas d'aquariums dans lesquels l'effet esthétique n'est pas prioritaire (bac d'acclimatation, de reproduction, de croissance), le décor pourra être constitué de pot de fleurs, briques creuses ou tout autre matériau neutre. Il sera alors facilement amovible tout en procurant un maximum de cachettes.
 
Les décors fixes, polystyrène ou mousse polyuréthanne, bien que très esthétiques quand ils sont bien réalisés, présentent des inconvénients avec ce genre de poissons : d'une part, comme nous le verrons plus loin, lors de l'introduction de nouveaux sujets et d'autre part, pour la capture de sujets en incubation ou malades (ou de jeunes). Notre préférence ira donc vers les décors constitués de roches facilement amovibles, le démontage/pêche/remontage pouvant alors se réaliser en moins d'une demi-journée (2 heures pour un bac de 2,50m), ce qui n'est pas un effort surhumain.

La composition physico-chimique de l'eau du lac Malawi n'a plus maintenant de secrets pour personne. Rappelons qu'elle est douce et basique, ce qui n'est pas évident à maintenir en aquarium. Fort heureusement, nos poissons sont accommodants et ils s'adapteront à diverses variations du milieu. Une eau de conduite dure à moyennement dure leur convient bien, une eau très douce (Auvergne) devra être alcalinisée pour stabiliser le pH. Cependant, un problème nous revient à l'esprit à la lecture, dans la revue de nos amis belges "Cichlide Contact" de septembre 1994, d'une interview de Ad Konings; celui-ci dit préférer les Cichlidés du Malawi pour leurs couleurs mais n'en maintient pas, car ils n'ont pas des couleurs aussi brillantes que dans le lac! En fouillant dans notre mémoire de vieil AFCiste, cela nous ramène à une conférence de Modeste de Salle au congrès de l'AFC à Roissy, en... 1981. M. de Salle avait déjà remarqué que les poissons étaient moins beaux en aquarium (et il ne pouvait pas mettre en cause un manque de volume !); la solution qui lui permit de "recolorer" les poissons fut de reconstituer l'eau à partir d'eau déminéralisée additionnée de bicarbonate de soude selon le principe suivant : dureté carbonaté = 13°f ==> pH = 8,2 (RFC n°15, 1/1982); si nous nous reportons aux caractéristiques physico-chimiques du Malawi, il y a concordance parfaite (RFC N°34, 12/83) (146mg/l de bicarbonate - 1/4 de bic. de Potassium et 3/4 de bic. de Sodium). D'après M. de Salle les poissons seraient alors extrêmement colorés. Dans ces conditions l'utilisation d'un osmoseur paraît très intéressante.

On ne peut nier non plus l'évidente incidence de l'éclairage sur la coloration des poissons; rien ne remplacera jamais la lumière dispensée par un soleil généreux ; mais nous n'avons pas tous la possibilité de réaliser un éclairage naturel. L'éclairage artificiel devra donc être correctement dosé, en quantité et surtout en qualité. Après avoir testé un certain nombre de tubes à usage aquariophile, il nous semble que les tubes Biolux, Aquaglo et Aquastar fournissent une lumière correcte pour la maintenance des poissons d'aquarium, l'addition d'un tube bleu (Philips TL 03 -1 watt de bleu pour 4-5 watts de "blanc" - pas trop de bleu qui "tuerait" les couleurs jaunes) n'est pas sans intérêt car il fait ressortir les couleurs bleues de nombreux m'bunas. L'éclairage sera suffisamment intense pour favoriser la croissance des algues vertes. Enfin, pour les aquariophiles fortunés et disposant de grands bacs, l'utilisation de spots à vapeur de mercure est la solution la plus esthétique: non seulement les couleurs des poissons sont particulièrement bien mises en valeur, mais le miroitement de leur rayonnement à travers la surface agitée par le rejet d'un filtre puissant recrée à merveille l'ensoleillement naturel. Ces lampes sont toutefois d'un usage aussi contraignant qu'onéreux: chères à l'achat et d'une consommation élevée, elles nécessitent l'aménagement d'un espace important au-dessus du bac, du fait de la chaleur qu'elles dégagent (bien entendu, il est absurde de perdre une bonne partie de leur puissance lumineuse en disposant un couvercle entre la surface et elles).

Une constante dans tout aquarium de Cichlidés des grands lacs africains est constituée par la teneur en oxygène. Là, il n'y a aucun problème : elle doit être la plus forte possible. Pour cela, la filtration (un bon bac à décantation ou un filtre semi-humide alimentés par une pompe efficace - 3 à 4 fois le volume horaire) devra être intense. Rappelons que le taux d'oxygène dissous diminue quand la température augmente, une température de 25 °C est donc préférable à 28øC. Malgré des températures parfois fraîches dans le lac, nous conseillons de ne pas descendre en dessous de 25øC car les poissons deviennent plus sensibles aux maladies.

Le taux de nitrates devra être le plus bas possible, mais cela devient de plus en plus difficile à obtenir avec l'eau de conduite dans certaines régions. Heureusement, un taux de 100mg/l est bien supporté. En fait, les Cichlidés du Malawi s'acclimatent bien dans une eau un peu "chargée" (dans la limite du raisonnable), contrairement par exemple à certains lamprologues - en particulier leurs alevins - du Tanganyika, qui sont très sensibles à la teneur en nitrates (Conkling D., Cichlid News, octobre 1992).

Suite : Alimentation et maladies

Autres articles