Exploration orchidophile sur la côte dalmate méridionale. |
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2 (quelques photos)
Page mise à jour en octobre 2006
suite à la discussion sur apifera.fr, faisant suite au post sur
les Ophrys de Croatie sur
le forum Ophrys
Rien de tel qu'une passion comme l'orchidophilie
pour avoir envie d'aller jeter un śil au-delà de nos frontières
afin d'y chercher ce que l'on ne trouve pas chez nous. En cette année
2003, mon objectif est d'aller explorer la côte dalmate méridionale
à l'extrême sud de la Croatie dans la région de Dubrovnik
pendant les vacances de Pâques du 13 au 27 avril 2003. Nous avons
réservé notre séjour dans un grand hôtel par
un voyagiste bien connu. Le séjour comportera deux parties : première
semaine d'explorations grâce à la location d'une voiture et
deuxième semaine sur place en profitant des éventuelles excursions,
de la plage et du soleil… mais surtout de la superbe colline surplombant
l'hôtel et présentée dans le catalogue du voyagiste
(y aurais-je quelques objectifs ?)
Un peu d'histoire et géographie. Depuis la guerre qui a ravagé la Yougoslavie il y a une dizaine d'année, la Croatie est un pays indépendant. La côte dalmate méridionale est une très étroite bande côtière orientée nord-ouest / sud-est allant de la presqu'île de Peljesac à la baie de Kotor (Montenegro) - Voir la carte - . Une très grande partie est bordée par la Bosnie-Erzegovine qui laisse place au sud au Montenegro. A vol d'oiseau cette bande ne dépasse jamais 10 km de large ; à Mlini, à quelques kms au sud de Dubrovnik, où je résidais, la frontière coïncidait avec la ligne de crête, soit sans doute moins de un kilomètre. |
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Le relief est constitué de chaînes
de montagnes parallèles à la côte. Il s'agit de montagnes
calcaires (karts) très sèches puisque l'eau s'y infiltre
rapidement (d'ailleurs quelques exploration aquatiques avec masque et tuba
m'ont montré que l'eau douce sort partout sous la surface de la
mer - la différence de densité permettant de voir les zones
troubles occasionnées par l'eau douce). L'essentiel des versants
est orienté vers le sud-est, donc très chaud, en fait peu
propices aux Orchidées, celles-ci se trouvant préférentiellement
sur les quelques rares versants orientés au nord-est.
La ville principale est Dubrovnik, à voir
absolument sans aucune réserve. En 1991/1992 la région fut
attaquée par l'armée yougoslave (Serbes, monténégrins
et bosniaques). Dubrovnik fut sérieusement touchée, ainsi
que ne nombreux villages alentours.
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Lundi 14 avril
Avant même de réceptionner la voiture de location, j'effectue une petite escalade sur la "colline" qui domine l'hôtel (600 m d'altitude). Déception, pas une Orchidée. Je me rends compte des dégâts occasionnés par les nombreux incendies de forêts, plus tard j'apprendrai qu'il y en a quasiment eu partout. La végétation brûlée semble avoir rapidement laissé place à des genêts, ajoncs et herbes hautes, ce sera quasiment partout pareil! Ayant obtenu la voiture, je me dirige l'après
midi vers le sud, dans la région de Gruda. Il n'est pas toujours
évident de s'arrêter sur les bords de routes car les bordures
sont quasiment inexistantes et, vu la façon de conduire des locaux,
il n'est pas vraiment conseillé de laisser la moitié de la
voiture empiéter sur la chaussée. De plus les bords de routes
sont toujours synonymes de décharge publique. La zone est intéressante
: il s'agit d'une grande plaine plus ou moins agricole bordée par
deux lignes de montagnes l'une la séparant de la mer offre un versant
orienté vers le nord-est et très propice aux Orchidées,
l'autre orientée au sud-ouest constitue la frontière avec
la Bosnie. Rapidement je trouve des Ophrys mais c'est la déception
car elles me semblent correspondre à O aranifera (sphegodes),
certaines toutefois s'en distinguent un peu. En fait, tout au long du voyage
je serai confronté au même problème ce qui fait que
je finirai par les baptiser Ophrys "de Croatie" et qui se révêlea
être O. montenegrina
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Mardi 15 avril.
Direction au nord vers la péninsule de Peljesac, c'est le royaume des oliviers et des vignes (on y fait un vin corsé très agréable). Quelques arrêts ne donnent aucun résultat. Peu après Polomje au tout début d'une pinède claire, je vois un pied de Orchis italica, une seule fleur est ouverte, d'autres pieds sont en boutons. Heureusement à quelques dizaines de mètre, il y a des pieds en pleine floraison. Il y a aussi O. anthropophora ; à tout hasard je cherche l'hybride éventuel, en vain. |
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Nous continuons jusqu'à Orebic, les orangers
sont couverts de fruits, l'eau est belle. Sur le chemin du retour, un arrêt
près d'un tas d'ordure (c'est là que ma femme va commencer
à en avoir assez d'être arrêtée au milieu des
déchets !). Ophrys "de Croatie" et un peu plus loin, quelques
pieds magnifiques de O. mammosa. Superbes, le périanthe est
vraiment bien coloré, les gibbosités très nettes.
En fait, la couleur du périanthe et la comparaison avec le livre
de Delforge me trompent. Ce n'est qu'Ophrys incubacea. Mais quelle
belle population.
O. mammosa serait absent de Croatie. |
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Mercredi 16 avril.
Retour vers Gruda pour voir mon "O. hebes". A l'exception de la macule, ça ressemble beaucoup à mes Ophrys vues partout ! déception ! Je cherche encore et tombe sur une touffe d'Ophrys ressemblant beaucoup à O. araneola. Il doit sans doute s'agir de O. tommasinii - ci contre. En 2006 j'apprends que O. tommasinii ne serait pas présent dnas le sud de la Croatie et qu'il doit s'agir d'O. incantata |
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Petite route vers Radovcici… Arrêt… Superbe
épis jaune…. Non, ce n'est pas Orchis provincialis mais O.
pauciflora, certes la différence est peu importante mais il
n'y a aucun doute. Si seulement trois pieds sont en fleurs, le site abrite
au moins 50 pieds en boutons. Dans deux semaines ce sera superbe (mais
je ne serai plus là !). Dans un petit chemin un peu plus haut je
trouve quelques pieds d'Orchis morio (désolé pour
les systématiciens mais je ne peux me résoudre à inclure
autre chose que pyramidalis dans les Anacamptis).
Jeudi 17 avril. Nous faisons le tour de la baie de Kotor au Montenegro. C'est un véritable fjord, magnifique. Je trouve toujours les mêmes Ophrys. Je vois aussi un Glaïeul d'Illyrie en début de floraison. Vendredi 18 avril. Retour vers Gruda, je m'oriente davantage vers la zone au nord du village, vers la Bosnie, donc sur le versant orienté au sud-ouest. Je trouve encore mes Ophrys. |
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Samedi 19 avril :
J'explore la petite vallée derrière Dubrovnik. Près de Brgat, je trouve de nombreuses Ophrys. Elles me semblent davantage influencées par O. mammosa. Il y aurait des O. liburnica. Dimanche 20 avril. Dernier jour avec la voiture. Retour vers Gruda/Plocice. Je trouve Ophrys aranifera hypochrome ainsi qu'une espèce, en boutons, vraisemblablement Gymnadenia conopsea. Deuxième semaine : N'ayant plus de voiture, tout se fera à pied ou lors d'excursions organisées. Le lundi une excursion vers les îles Elaphites me permet de trouver sur Sipan des rosettes ainsi qu'un gros pied d'Orchidée dont la tige a été cassée. Identifications impossibles. Le mardi je trouve dans l'enceinte de l'hôtel à Mlini un pied d'Ophrys montenegrina. A la limite de Mlini et de Kupari dans une oliveraie fraîchement plantée je vois quelques pieds de Orchis laxiflora dont une superbe touffe très dense. On m'a indiqué des Ophrys sur l'île de Lokrum à quelques encablures du port de Dubrovnik j'y fais un saut le jeudi. Ce seront encore les mêmes qu'habituellement mais l'île est superbe avec sa végétation luxuriante n'ayant pas souffert des incendies. Durant le reste de la semaine j'explorerai en vain les abords de Mlini. La colline surplombant l'hôtel sera toujours vierge d'Orchidées, mais pas d'autres plantes et la vue y est exceptionnelle. En résumé le voyage a été, d'un point de vue orchidophile, assez décevant. Peu d'espèces et en petit nombre (hormis les aranifera/mammosa). Le problème des Ophrys : Durant ces deux semaines je me suis heurté à un problème d'identification des Ophrys. N'étant pas vraiment spécialiste, rien n'est évident. La grande majorité des pieds semble correspondre à O. aranifera mais, parmi eux, quelques pieds sont remarquables : champ basal plus ou moins sombre et/ou gibbosités plus ou moins marquées marquées et/ou pétales latéraux unis ou bicolores. Il semble donc qu'il y ait une large introgression de O. aranifera par O. mammosa dans cette région. Je n'ai jamais trouvé de population vraiment nette (sauf les quelques pieds de mamosa de la presqu'île de Peljesak, qui sont donc des incubacea !!). Dans son livre, Delforge parle de Ophrys montenegrina. C'est vrai que de nombreux pieds semblent répondre à sa définition de l'espèce mais j'ai toujours trouvé des pieds "montenegrina" au sein de populations davantage "aranifera" de plus l'espèce serait endémique des côtes du Montenegro… mais c'est si proche ! J'ai donc quelques doutes sur la validité de cette espèce. Pour terminer, après réception des photos prises, je me rends compte que leur très grande majorité présente des pétales latéraux bicolores (mammosa/montenegrina). Il est vraisemblable que, inconsciemment, j'ai photographié des pieds différents de ce que je connais (aranifera) qui pourtant étaient prédominants. Voilà, quelques indications pour ceux qui seraient tentés par la prospection dans ce pays qui s'ouvre à nouveau au tourisme.
Bibliographie : Delforge P. 2001.Guide des Orchidées d'Europe
d'Afrique du Nord et du Proche-Orient. 2ème édition. Delachaux
et Niestlé.
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© 2003 Philippe Burnel