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A la découverte des Orchidées de Rhodes
Avril 2010

Les photos :

Orchis S.L.   Euophrys      Pseudophrys     Serapias      Hybrides, lusus et hypochromes

fleurs diverses

Le Gizani


 

Voilà de nombreuses années que je n'avais pas posé les pieds en terre grecque. J'y étais allé il y a bien longtemps, en avril 1981 et 1988, à une époque où je ne m'intéressais pas encore aux orchidées européennes. Je suis donc certainement passé à côté de belles découvertes.
Il fallait donc combler cette lacune et les divers récits de voyages faits par les amis de la SFO Normandie m'incitaient bien à aller poser mon APN sur la belle île grecque et  y découvrir des merveilles inconnues.
Pour des raisons pratiques le camp de base se situe dans un des grands hôtels de la côte Nord-Ouest, à quelques kilomètres de la capitale. Ce n'est certes pas la meilleure situation  puisque les sites de prospection les plus intéressants se situent plutôt au Sud. Je me prépare donc à effectuer beaucoup de kilomètres.

 

Dimanche 4 avril
Arrivée à Rhodes à 3  heures du matin. Dodo puis recherche d'une voiture. C'est vite fait, je l'aurai le lendemain matin.. Nous profitons donc de la journée pour faire un peu de tourisme dans la ville de Rhodes. La vieille ville est très agréable et typique, c'est Pâques et il y a peu de monde, on est tranquille. Nous faisons aussi le tour des remparts, sur les vieilles murailles de gros lézard Agaminae, Laudakia stellio se prélassent au soleil mais se laissent peu approcher. Après une pose « piscine » je vais ensuite aux alentours de l'hôtel. J'observe de jolies punaises sur de grandes marguerites (Chrysanthemum coronarium var. bicolor)
Lundi 5 avril : Objectif lumière..
Lumière comme Ophrys lucis. L'espèce doit être en fin de floraison donc il faut se dépêcher. C'est le 1er objectif du séjour. J'ai plusieurs infos, dont des points GPS.
Direction le centre de l'ile dans la région de Laerma. J'ai décidé de ne pas m'arrêter tant que je ne suis pas arrivé, mais les tentations sont grandes. On a envie de s'arrêter tous les 100 mètres !! Mais je tiens bon... jusqu'à un arrêt hygiénique. Juste devant la voiture.. un bouquet de Serapias bergonii. Il n'est pas possible de ne pas immortaliser mon premier bouquet insulaire ! J'en profite pour explorer un peu les alentours et je découvre mes premiers Ophrys : O. rhodia, O sicula très petit, en fin de floraison et ce qui ressemble à des papilionacea  fanées.
Je fais une nouvelle halte sur la route entre Apolllona et Laerma car mon regard est attiré par de nombreux Orchis italica. Ils sont en fin de floraison mais certains pieds sont encore très beaux. Il y a aussi de beaux Ophrys : O. reinholdii, O. polyxo,  O. episcopalis, , peut-être candica.
James Mast de Maeght me signale que les photos de ces dernières plantes  (episcopalis et candica ?) correspondent  à un nouveau taxon Ophrys  saliarisii récemment décrit par Paulus. O. episcopalis et Op. heldreichii ne seraient pas présents à Rhodes. Parmi les O. reinholdi il y a un pied qui ressemble beaucoup à O. straussii
Il y a aussi un Anacamptis pyramidalis blanc en tout début de floraison.

Ruelle de Rhodes


 

Après Laerma la piste est plus difficile. Le premier arrêt pour O. lucis est infructueux, le deuxième aussi. Dans un virage je trouve de jolis O. mammosa et polyxo. Plus loin une grosse citerne. Pas grand chose : Serapias (il y en a partout) et un O. polyxo
Plus loin je rencontre un couple d'autrichiens. Ils ont trouvé O. sicula et O. attaviria
J'arrive enfin au but de la journée : la dernière station d'O. lucis. Je trouve un pied avec une fleur.. il était temps, mais je vais finir par me rendre compte qu'il s'agit de O. ferrum-equinum. Il y a aussi des mammosa de taille impressionnante, quelques pieds d'O. reinholdii dont un très petit, bizarrement fichu, peut-être hybridé. Mais avec quoi ?
Je prends le chemin du retour en m'arrêtant ici et là. Je trouve de gros Op. attaviria au labelle très genouillé.
Sur la route de Apollona je m'arrête à la station 32 de ICT, le gué, très prometteuse. Les Serapias ne se comptent plus. Je trouve facilement malgré leur discrétion des Ophrys regis-ferdinandii en fin de floraison. Plus loin deux pieds d'Anacamptis papilionacea heroica pas très frais, des O. attaviria, O. bombylifora,  rhodia, cinerophila. Des fritillaires de Rhodes. Il y a surtout des Ophrys scolopaxoïdespas évidents à déterminer. Il y aurait oestrifera, bremifera, polixos selon Isabelle mais les oestrifera (décrit de Crimée) de Rhodes sont en fait des polyxo dont la variabilité est extrême. Il y aurait aussi des hybrides entre ces plantes, je trouve ce qui ressemble à candica X polyxo. J'abandonne l'identification, on verra ça au retour mais je ne vois qu'un groupe de plantes ayant une grande variabilité morphologique. Est-ce cohérent de donner à certaines un nom spécifique ?
De nombreuses plantes sont encore en tige. Il faudra revenir.
Le dernier arrêt se fera peu avant de retrouver la route de la côte Ouest. Il y a des O. italica presque terminées, quelques O. attaviria et, là aussi, de nombreux Ophrys  dont les hampes laissent présagées de belles floraisons.
Une première journée bien remplie, mais quel délire pour identifier certaines plantes !

 

  Mardi 6 avril : 
Direction Profitis Ilias, zone montagneuse du centre-nord de l'île. 
Premier arrêt à la borne 44, il y a des Neotinea maculata fanées (il y en a partout dans la région), des Anacamptis pyramidalis blanches commencent à s'ouvrir. Je reprends la route mais comme le GPS tarde à repérer les satellites, je loupe la station suivante. Au KM 47, à l'embranchement des routes il y a beaucoup de cyclamens, des anémones heldreichii très nombreuses et quelques anémones coronaria. Je trouve les deux premiers pieds d'Orchis anatolica, de beaux Ophrys reinholdii et quelques ce qui ressemble à Ophrys heldreichii et Op. dodekanensis. En fait des allemands sur place me disent que ce sont des heldreichii alors qu'ils seont tous considérés à mon retour comme  dodekanensis. Le GPS s'étant décidé à fonctionner je redescends vers le km 46. C'est la fête ! Orchis anatolica, Op. reinholdii, Op. attaviria, Op. sicula, Op. rhodia, O. heterochila et Anacamptis heroica.
Je repars vers Profitis Ilias et m'arrête un peu après de km 48. Il y a des Orchis provincialis, Orchis antropophora, Ophrys reinholdii. En redescendant un peu, près d'une fontaine je trouve à nouveau des Or. provincialis, Anacamptis picta. Je ne vais pas m'attarder sur cette dernière espèce que je connais déjà du Sud de la France. Je ne fais que deux photos. ERREUR ! car en 2013, je me rends compe, grâce au forum "OPHRYS" que ces plantes sont en fait plus probablement des Anacamptis caucasica. BOULET DE SERVICE !!!!
Il y a de nombreuses feuilles de pivoines mais, malheureusement, aucune fleur. 
Je prends la route menant au « camp des enfants» J'y vois quelques An. laxiflora et heroica. Un orchidophile du coin me dit qu'il y a très peu de plantes cette année en raison du manque de pluie. 
Je finis par rejoindre Profitis Ilias d'où je décide de rejoindre Apollona. A l'embranchement des routes dans un massif rocheux il y a une belle station d'Orchis anatolica
Depuis Apollona je rejoins la route menant à Laerma, déjà empruntée la veille. 
Mon regard est attiré par de nombreux Limodorum abortivum. Je connais bien l'espèce mais la station semblant intéressante, je m'arrête. A peine sorti de la voiture deux pieds brillent au soleil... des hypochromes.. superbes.
Je continue jusqu'au grand pont. Des allemands me disent avoir vu tout près des Op. candica. Je ne trouve qu'un pied à très longues gibbosités (var. minoa). Il y a des Serapias dont un pied bien clair, quelques Orchis italica et Ophrys polyxo.Je prends une piste et trouve une grande zone herbeuse. Il y a là de nombreux Anacamptis laxiflora très beaux. Et... deux pieds bien blancs, magnifiques.
Plus loin en continuant vers Laerma, une zone plane entre la route et la rivière m'offre encore des Serapias et Op. polyxo assez variés avec des labelles plus ou moins fusiformes, des gibbosités plus ou moins fines et longues, des fleurs plus petites (Il va y avoir du boulot sur le forum « Ophrys » en rentrant !). Une plante pourrait être un hybride polyxo X rhodia. De nombreux An pyramidalis pointent le bout de leur nez. 
Je reprends la route vers Apollona pour rentrer vers le Nord. Un dernier arrêt me fait découvrir de nouveaux Orchis italica  très avancés et un nouveau limodore hypochrome.


Montagne de Profitis Ilias depuis la route Apollona-Laerma


 

 Mercredi 7 avril.
Sophie veut se faire promener. Nous (enfin « je ») décidons d'aller visiter Lindos.
On galère un peu pour trouver la sortie de Rhodes dans la bonne direction (mais ça me permet de repérer l'accès à un site potentiellement intéressant pour les jours prochains.)
Lindos est une ville magnifique, typiquement grecque avec ses maisons blanches et dominée par l'acropole. La promenade dans les ruelles est très agréable et l'intérieur de la petite église est une pure merveille. Nous achetons un gros kilo d'oranges bien juteuses qui feront notre repas du midi... un vrai régal. Gwendal Bodilis m'a dit qu'il y a plein d'Ophrys rhodia dans le chemin qui monte à l'acropole mais.... rien.. strictement rien ! Déception. La vue depuis l'acropole est sublime. Le temps est un peu incertain mais le vent et les nuages donnent des lumières très photogéniques. 
Evidemment je ne me suis pas orienté vers Lindos sans arrière pensée....
En sortant de Lindos nous nous dirigeons vers Lardos. D'abord à Pilonas il faut aller voir le cimetière mycénien. Là, pas grand chose, encore quelques Serapias, des plantes fanées, d'autres en hampes. Dans un des trous du cimetière je découvre un énorme arum Dracungulus vulgaris à l'odeur si « particulière » ! Je décide de monter au dessus du cimetière, d'autres arums sont là, absolument énormes. Je monte dans la phrygane bien chargée en Serapias. Je vois de belles renoncules Ranunculus asiaticus d'un rouge éclatant. Plus haut il y a des Ophrys regis-ferdinandii en fin de floraison. Je suis attiré par une fleur qui a une pollinie collée sur le labelle. En faisant la photo, et donc en voyant vraiment la fleur en gros plan je lui trouve un drôle d'air ! Certes la fleur est très petite mais son labelle est moins allongé que ce qu'il devrait être, plus rond, d'aspect plus court. Serait-ce un hybride avec O. speculum ? Probablement.
Nous reprenons la route pour la station baptisée « le béton ». Pourquoi ? Quand  on arrive sur place on comprend rapidement.. des coulées de béton partent de la route pour descendre vers la prairie. Il y a peu d'orchidées. Quelques rhodia, des Serapias, des calypsus ?? et polyxo. Mais surtout je repère un O. rhodia très bizarre: pas de macule, un labelle entièrement brun-rougeâtre, légèrement bicolore.

 

Je monte de l'autre côté de la route. Un O. rhodia. Autant dire rien.
Nous continuons jusqu'à un site sur la route du monastère d'Ipseni, toujours près de Lardos. Nouvelle déception : quelques Serapias et deux rhodia.
Sophie en ayant assez de bouquiner dans la voiture, nous rentrons vers Rhodes pour faire un nouveau petit tour dans la vieille ville. Elle recèle de vrais trésors. C'est un réel plaisir de se promener dans ses vieilles ruelles.
Jeudi 8 avril
J'ai envie de trouver Ophrys omegaifera. Une station semble se trouver non loin de Rhodes sur la route entre Maritsa et Psinthos. Je m'arrête juste à la sortie de Maritsa car une zone me semble favorable. J'y trouve des plantes fanées, dont des papiolionacea probables, un Op. sicula, un Op. rhodia. Je trouve ensuite facilement la zone de la station où je devrais trouver Op. omegaifera. Je cherche longtemps.  Il y a énormément d'Orchis anatolica mais pour les Ophrys c'est une autre paire de manche !  Je trouve un sicula et enfin un omegaifera dont la dernière fleur ne pourrait, de toute évidence, se présenter à un concours de fraicheur ! M'enfin, c'est la seule et c'est la première fois que j'en vois. Plus loin je trouve deux Op. ferrum-equinum, plus très frais non plus.
Je décide de partir à l'aventure en continuant la route vers le sud. Un peu plus loin dans un virage il y a une grande zone plate avec des oliviers. Sur le bord je trouve un Ophrys polyxo et un sicula. Un gros lézard vert se laisse, modérément, approcher.  Encore plus loin, dans un tout petit chemin, je trouve encore des polyxo, et des attaviria.
Je décide de poursuive vers le Sud via Arkhipolis mais, juste avant la ville je bifurque vers Epta Piges (les sept sources). 
Je m'arrête au monastère de Saint Nektarios. Sur le bord de la route il y a un platane si grand que l'on peut rentrer dans son tronc creux. Il faut prendre le petit chemin à droite menant vers deux panoramas. On voit rapidement au début des Serapias et Op. polyxo. J'ai trouvé aussi un Op. rheinholdii fané, il y a aussi des cyclamens. Le chemin monte dans un chaos de roches, jalonné par les fleurs énormes des Dracungulus. On croise quelques oliviers pluri-centenaires aux tronc noueux et énormes et quelques pieds non fleuris de pivoines.  La vue depuis les deux panoramas, surtout le plus haut, est  absolument magnifique.

Monastère de Saint Nektarios

Peu avant Epta Piges la route est bordée par un petit aqueduc (issu des sources). On peut s'arrêter quand l'aqueduc est à gauche de la route. Il y a là une zone sympa. J'y trouve des Serapias, Op. sicula et un Ophrys que je rattache à O. polyxo. Ses gibbosités sont très développées, faisant penser à Op. cornutula mais vu que sa petite sœur voisine a des gibbosités normales, il ne semble pas utile d'affubler la plante d'un nouveau nom.

Je reprends la route pour Epta Piges. C'est sympa mais je n'y vois pas une seule orchidée. Je continue donc vers Kolimbia et de là vers le cap Vagia. 
Tout de suite je trouve des Anacamptis sancta  en bouton puis quelques pieds en fleur. Il y a des Anacamptis pyramidalis, Op. sicula, Op. phryganae (je vois enfin bien la différence), Op. regis-ferdinandii quasiment terminés, Op. rhodia, Serapias, Op. mammosa.
Je rentre en faisant un détour par Koskinou au sud de Rhodes. La zone était, parait-il, intéressante mais elle est, maintenant, totalement urbanisée. Par contre c'est super pour se perdre !!! Heureusement à Rhodes on peut toujours se diriger grâce au soleil.. 
Vendredi 9 avril.
Je me dirige vers le Mont Attaviros, point culminant de l'île.
Je m'engage dans la montée et m'arrête juste après un virage (1,5 km) en tout début de forêt. C'est le paradis : en bord de route on trouve des dizaines d'Op. omegaifera, Op. candica, Op. reinholdii en pleine floraison. Il y a aussi un Op. ferrum-equinum  pas frais, des limodores. En s'enfonçant un peu sous les pins on trouve Orchis anatolica et  Anacamptis heroica.
200 mètres plus loin c'est une véritable forêt de limodores qui commencent à fleurir. Encore 200 m et ce sont, à nouveau des candica.
Je continue ma route jusqu'à la fin de la voie goudronnée. Dans les pins je trouve Op. candica, Op. reinholdii, An. picta  et Neotinea maculata encore en fleur. 
Je continue la piste dans un paysage dénudé. jusqu'à quelques poteaux électriques. Il y a là Or. anatolica, Or. provincialis , An. picta, et An. heroica.
Je décide de ne pas poursuivre l'ascension et redescends (Attention... traversée de chèvres) pour prendre la route de Ayos Issidoros. De là je m'engage dans la piste menant à Laerma. 
Un premier arrêt à un embranchement est très fructueux. Dans le petit chemin qui part à droite je trouve une belle population de Or. italica, des Serapias et des An. heroica dont certains pieds sont très clairs et, enfin, un complètement hypochrome.
Je reprends la piste jusqu'à une grosse citerne. 100 m plus loin il y a de beaux Op. reinholdii dont un pied à marge jaune. 
La zone a été ravagée en 2008 par un gigantesque incendie parti de Agyos Issidoros. La piste semble, par endroit, faire la frontière entre les zones brulées et les zones indemnes. Dans certaines zones les pins sont encore sur pied, morts, alors que les oliviers ont de nouvelles pousses, l'arbre est de toute évidence bien adapté à supporter les incendies. Par endroit on voit déjà de tous jeunes pins qui se sont semés après l'incendie. La nature reprend ses droits.

Je repars vers Laerma puis le monastère de Thari. Environ 300 m avant je trouve de beaux Op. attaviria et un heroica.

L'heure commence à avancer et je veux passer par le gué sur la route de Laerma à Apollona afin de voir l'évolution des plantes. Les Op. attaviria sont encore en bonne forme,   il y a quelques rhodia et regis-ferdinandii. Les plantes que j'avais vues en hampe en début de semaine n'ont pas beaucoup évolué mais un pied en bouton me confirme leur identification : An. coriophora fragrans. Je sais maintenant que j'en ai vu partout. Je prospecte un peu aux alentours, il y a une zone couverte de milliers de Serapias bergonii. Et même pas un hypochrome ! Je découvre une touffe fanée d'Op. speculum et, dernière cerise sur le gâteau, un petit pied d'Op. omegaifera
Je peux rentrer.

 

  Samedi 10 avril.
Le soleil est caché, le ciel est blanc. Bonne luminosité mais blanc.
Je vais voir le centre de plongée tout proche pour connaître les possibilités d'aller tremper les palmes... 57 € la plongée... 
« Le diable a des varices et les avares vicieux » comme disait Molière mais vu ce que j'ai dépensé en location de voiture, je me passerai d'aller me cailler une heure sous l'eau (surtout que si les fonds ressemblent à ceux de Kemer, pas si éloignés et explorés l'été dernier, ça fait cher pour des tas de cailloux !)
La matinée est ensuite consacrée à la visite du musée archéologique de Rhodes. De bien belles pièces. Je suis toujours admiratif devant l'art des sculpteurs capables de sortir une merveille de délicatesse à partir d'un bloc de marbre.
L'après-midi je descends vers la rivière Gaidouras, au nord de Lindos, afin d'y trouver Op. colossea. En fait de rivière, il n'y a pas une goutte d'eau dans le lit ! Je m'attarde d'abord sur la rive gauche, entre la route et la plage, dans de grandes zones herbeuses. Je découvre, pour mon plus grand plaisir un hybride entre An. coriophora fragrans et An. sancta, alors que je ne vois pas les parents en fleur. Il y a encore beaucoup de Serapias, des An. pyramidalis blanches (cela semble être la couleur dominante sur l'île), des Op. rhodia. Je finis par trouver un pied de An. sancta et un deuxième hybride. Finalement je trouve enfin un pied d'Op. colossea. C'est très beau, ça ressemble beaucoup à nos Op. fuciflora. 
Je me dirige ensuite vers la rive droite. J'ai beaucoup de mal à trouver, je cherche à droite et à gauche, je ne vois que deux sancta. Finalement la petite phrygane d'environ 20m sur 10 se laisse approcher. Il y a une vingtaine de pieds de l'Ophrys colossea tous différents, avec parfois des gibbosités bien développées. 
Je rentre en faisant un petit détour par Haraki, joli petit village en bord de mer, surmonté par les ruines d'un château. Je fais quelques photos d'insectes et rentre vers Rhodes sous une petite averse qui aura bien du mal à remplir le lit du fleuve Gaidouras.

 

 
Dimanche 11 avril
Il tombe des cordes. Je voulais aller vers le sud mais je n'ai pas particulièrement envie d'aller me rouler dans l'herbe mouillée. Je mets donc un peu d'ordre dans les photos (vive le tout petit portable du boulot...) en espérant une petite éclaircie. 
Lundi 12 avril
Le soleil est revenu mais le vent souffle très fort. Il y a  des moutons sur la mer et des chèvres sur les routes.
Je prends tôt la direction du Sud par la côte Ouest moins urbanisée, plus sauvage que la côte Est. La route est excellente, toute neuve, un peu sinueuse au niveau du Mont Ataviros mais il y a très peu de voitures. C'est donc très tranquille. 
De gros nuages sont accumulés sur la montagne et il fait très froid. Une fois les montagnes passées, le soleil est de retour mais le vent n'a pas faibli.
Je descends jusqu'à Kattavia où je prends la route vers l'extrême pointe Sud, Prasonisi. Je m'arrête au bout de quelques kilomètres dans une zone où la route est bordée de grandes phryganes.
Tout de suite je trouve Anacamptis coriophora fragrans en pleine floraison. Il y en a des centaines de pieds. Je suis content car c'est une espèce qui m'échappe depuis longtemps en France, effectivement son odeur est très agréable. Je trouve rapidement un pied hypochrome. Il y a aussi des Serapias carica en fin de floraison, mais quelques-uns sont encore « potables ».Il y a aussi beaucoup de glaïeuls et un pied d'Op. regis-ferdinandii.
Je continue vers le sud, jusqu'à la piste montant vers des antennes. Encore beaucoup de fragrans, pyramidalis, carica très limites. Je trouve aussi un Ophrys « fusca » au labelle très plat, avec une fine marge jaune. J'opte finalement pour Ophrys blitopertha, sans conviction. (Op lindia ?)

Prasonisi, extrémité sud de l'île

Je remonte un peu vers le Nord. A l'église de St Panteleimon, je ne trouve strictement rien.

A Ayos Pavlos, il y a des S. carica, pour la plupart finis, des fragrans en quantité, des  Op. regis-ferdinandii et polyxo quasiment passés.
Je me dirige ensuite vers Plimiri où le port est en cours d'agrandissement, une zone hôtelière étant en construction à quelques centaines de mètres de la plage. Au-dessus d'un petit restaurant où des poulpes sèchent je trouve des An. sancta.
Je reprends la route pour Hochlakas, formidable village sans aucune maison ! Non loin il y a une phrygane intéressante. Je trouve facilement des An. coriophora et fragrans. Les hybrides entre les deux espèces sont nombreux et variés ; il est même parfois difficile de dire si telle plante est pure ou hybridée ! Il y a aussi des carica fanés. 
Soudain une plante m'attire l'œil. Nul doute c'est un hybride entre fragrans  et pyramidalis. Je trouve d'ailleurs un peu plus loin quelques pieds de pyramidalis
Je peux rentrer vers Rhodes tranquillement en m'arrêtant ici et là pour faire quelques photos touristiques. L'esprit est un peu occupé à penser à mes découvertes et... paf la chèvre ! La Panda vient de se taper une chèvre.. ça va faire un bel hybride.
La pauvre bête ne s'en est pas remise car des amis de l'hôtel m'ont, plus tard, affirmé l'avoir vu morte ce jour là à cet endroit. Dans mon rétroviseur elle avait la quatre pattes en l'air au milieu de la route. Le pare-choc est un peu abimé, mais ça ne se voit pas trop.
Je pense avoir fait ce soir le tour de toutes les espèces observables en cette saison mais j'irai encore explorer quelques stations ou en visiter à nouveau d'anciennes.
Mardi 13 avril.
Le temps est magnifique, pas de vent et grand soleil. Nous décidons une journée touristique vers la côte Ouest. Je veux montrer à Sophie les superbes paysages vus la veille au pied du Mont Attaviros, quand la montagne tombe dans la mer. 
Premier arrêt pour voir les ruines du château de Kritinia. La vue y est exceptionnelle. Je photographie un lézard de tout près (j'ai laissé les gros objectifs dans la voiture !). Il y a aussi un agame très rapide. On continue ensuite vers Monolithos. Là aussi c'est très beau. Je rencontre un couple de jurassiens et nous parlons Orchidées, ils cherchent Or. provincialis... facile ! Ils sont là depuis quelques semaines et sont venus en voiture... quel périple !
Nous repartons vers le Nord. Direction Stellies où une station semble intéressante.
La petite église est très belle et les clés sont sur la porte ; je fais donc quelques photos à l'intérieur. Je trouve rapidement des Orchidées aux alentours : Op candica nombreux, Op. reinholdii, Op. attaviria, Op. sicula, des Or. anatolica  finies, des hampes d'Anacamptis.Mais surtout un très bel hybride entre Op. reinholdii  et certainement Op. ferrum-equinum.
Nous remontons vers le Nord et profitons d'un bon moment devant un thé et une bière sur le petit port de Kamiros Skala. La mer est belle, le soleil chaud... on est bien.

 

 
Mercredi 14 avril
Je repars vers Profitis Ilias car je voudrais revoir quelques plantes (si elles sont encore en fleur) pour essayer de mettre un nom sur certaines photos, maintenant que je comprends un peu mieux les orchidées de Rhodes. 
Au km 46, je retrouve des reinholdii, attaviria,sicula, rhodia encore bien en fleur et  probablement heterochila quasiment fini.
Plus haut, au carrefour (km 47), il y a toujours les reinholdii, sicula, attaviria et dodekanensis quasiment fané mais on voit bien la bande noire entre les pseudo-yeux. Il y a aussi un grand dodekanensis à périanthe blanc
Je me mets en quête de pivoine (Paeonia rhodia), je sais qu'il y en a dans une zone escarpée. Je ne trouve rien que des petits pieds. Mais je suis allé trop loin et c'est en revenant que je tombe sur la station dans une zone très pentue. Il y en a beaucoup mais elles sont en graine. Finalement je trouve deux pieds sur lesquels les pétales sont encore en place, plus très beaux mais au moins... je l'ai !
Je monte au Children Camp : laxiflora, Ne. maculata encore belles,  An. heroica et Op. reinholdii
.
Je repars ensuite vers Profitis Ilias, je cherche vers le km 49, sans résultat. Toutefois je trouve, sous les pins, deux pieds de Aristolochia guichardii dont un avec une fleur bien fraîche. 
Comme Sophie m'attend de bonne heure, je redescends vers Eleoussa.
Je m'arrête à l'embranchement de la route de Apollona où je dois trouver de nouvelles aristoloches dans un amas rocheux. Il y en a en effet, pas trop fraîches. Il y a de belles orobanches violettes (Orobanche ramosa). Je m'attarde alors sur les cailloux, ou du moins sous les cailloux. C'est dingue ce qu'on trouve sous les cailloux : mille-pattes énormes et colorés, araignées velues, cloportes, carabes ; enfin je trouve ce que je cherche : des petits scorpions jaunes (Mesobuthus gibbosus)

 

Je reprends la route et m'arrête à l'église de Saint Nikolas Foundoulaki (à ne pas manquer). C'est une très belle église byzantine du 15ème siècle. Les portes sont ouvertes et je peux photographier les fresques qui ornent son intérieur (il faudrait une sacrée restauration !). Mais il ne faut pas hésiter à regarder autour de l'église. Il y a là des arbres, oliviers et platanes, absolument remarquables, aux troncs énormes souvent creux. De vénérables pluri-centenaires absolument exceptionnels. Il faut aussi regarder au pied de ces vieux arbres, il y a de nombreux Arum dioscurides en début de floraison. 
Un peu avant Eleoussa, je vois une zone herbeuse sur laquelle poussent des Op. rhodia ; il y a aussi des Anacamptis en hampe.
En arrivant à Eleoussa par cette route, on voit un immense bassin circulaire. Il y a des poissons rouges mais c'est surtout un bassin de sauvegarde pour le gizani (Ladigesocypris ghigii), petit poisson endémique de Rhodes gravement menacé. On en voit des dizaines se nourrissant le long des bords.
Jeudi 15 avril.
Il fait super beau, grand bleu etpresque pas de vent. Je n'ai quand même pas amené jusqu'ici palmes, masque, tuba et shorty pour les laisser dans la valise !
Direction le cap Vagia pour voir où en sont les orchidées. Je trouve quelques Op. colossea. Les An. sancta sont plus avancées que le 8 avril, par contre, les fragrans ne sont absolument pas en fleur. La différence avec les plantes du Sud est extraordinaire.
Je descends sur la plage pour aller voir ce qu'il y a sous l'eau. La zone est peu profonde (pas grave avec un shorty et sans lestage je ne descends pas profond). Ca ressemble assez à Kemer en Turquie : pas d'algues, quasiment pas de poissons, assez lunaire. Je trouve quand même un gros lièvre de mer assez coloré qui se laisse facilement photographier (les lièvres de mer nagent beaucoup moins vite que les tortues de mer ; La Fontaine pourrait inverser sa fable).

Lièvre de mer

Nous repartons ensuite vers Rhodes, je dépose Sophie sur la plage et me dirige vers les douves des fortifications : opération Agame. Il me faut de bonnes photos. Je sors le pied mais le gros 300mm est lourd pour ce tout petit pied et l'ensemble est peu stable. Je ne sors que très peu de photos vraiment bonnes. Je m'en contenterai.

Je vais ensuite visiter l'aquarium. Les dimensions « bonzais » feraient bondir certains aquariophiles que je connais bien.
Tiens un volca vient d'entrer en éruption en Islande
On vole quand ??

Vendredi 16 avril.
 

Objectif bronzette. Il fait un temps magnifique, nous montons jusqu'à Filerimos pour admirer la vue sur Rhodes. Puis balade et ville et plage. On se gonfle de soleil avant de rentrer en Normandie dans... selon la bonne volonté du volcan islandais !
Samedi 17 avril
Pas la joie, de nombreux voyageurs sont regroupés dans notre hôtel dont les passagers d'un avion Louxor-Bruxelles détourné sur Rhodes.
Le départ de demain matin est fortement compromis. Dernier jour de location de la voiture. Il faut qu'on réussisse à se connecter sur internet pour pouvoir envoyer quelques messages.
L'après-midi j'en ai un peu assez de faire le lézard au bord de la piscine. Je file vers Filerimos pour faire quelques photos d'insectes. Il y en a beaucoup. Je trouve aussi dans la montée quelques pieds d'Ophrys colossea. Ce seront mes dernières orchidées rhodiennes.
En rentrant France 24 annonce que les aéroports sont fermés au moins jusqu'à lundi matin... On n'est pas rentrés ! Mais, après tout, nous sommes logés dans un 5* aux frais de la compagnie aérienne... il y a pire comme punition ! Il faut penser à ceux qui sont en transit dans des aéroports depuis plusieurs jours sans aucune solution. 
Dimanche 18 avril.
Nous sommes toujours là, en attente. On devait avoir des nouvelles à 10 h ; nouvelles rapides « prochaines nouvelles à 21h »... c'est succinct !!
Les belges du Louxor/Bruxelles ont réussi à partir ce matin : Leur Louxor/Bruxelles s'est transformé en Louxor/Rhodes (3 jours d'arrêt) – Rhodes/Alicante – Alicante/Bruxelles (20 heures de car !).
Des suédois quittent l'hôtel : Rhodes/Athènes en avion puis Athènes/Suède en car... 40 heures environ... pas la joie.
Lundi 19
La galère se poursuit !
Le midi les passagers pour Bordeaux-Deauville peuvent partir. Ils sont contents mais on apprend qu'ils seront débarqués à Marseille (alors que les marseillais doivent rester à l'hôtel !) et que les frais ultérieurs seront à leur charge (on apprendra le lendemain qu'une loc de voiture Marseille-Aurillac coûte 400€ avec l'essence.
On est en attente toute la journée... rien pour nous
Ah si ! A partir de ce soir le voyagiste Marmara ne prend plus en charge notre hébergement : 98 € par jour pour deux en demi-pension !!! Après une révolution des passagers, on nous fait grâce des 20€/personne pour le repas du soir.
Appel au consul de France d'Athènes : « M. le consul est fatigué de son week-end »... Grandiose !
Mardi 20
On libère les chambres pour ne plus avoir à régler.
Des nouvelles : Marseille-Lyon peut partir (arrêt à Marseille puis... démerdez-vous..) ainsi que Nantes. 
Nous restons une vingtaine de « parisiens » dans le hall de l'hôtel.. comme des cons !
Nous apprenons que les passagers de l'avion de la veille (Marseille) ont pu constater que tous les voyagistes ont affrété des cars à Marseille pour transporter leurs vacanciers. Sauf... Marmara !!!
A 13 h nous apprenons que les représentants de Marmara ne reviendront pas nous voir avant 19h pour nous dire probablement qu'il n'y a pas de solution. Nous envisageons de passer la nuit sur les banquettes du hall. 
Les factures de l’hôtel sont délirantes, certains payent une nuit sur deux. Moi on m’en demande deux. Je fais un scandale. Ils s’en souviendront. J’obtiens une entrevue avec le vrai directeur de l’hôtel (également consul de Belgique !), notre ardoise est effacée, il nous invite à 9 dans le restau gastronomique et nous offre 4 suites grandioses. En plus il fait de superbes cadeaux pour mon petit-fils qui doit naître ces jours-ci. La grande classe ce Monsieur !
Mercredi 21.
Nous décollons à 17h locale pour… Lyon, mais des cars nous conduisent gratuitement à Roissy, Marmara a fait pour nous ce qu’ils auraient dû faire pour tout le monde. Tant mieux pour nous.
Arrivée à Rouen à 5h30.
Je remercie (en essayant de n'oublier personne car la liste est longue) tous ceux du forum « Ophrys » qui m'ont fourni des renseignements pour optimiser ce séjour : Isabelle et Georges, Gwendal (tous les trois notamment pour les cartes et livres prêtés), Elisabeth et Jean-Luc, Adrien, Olivier, France et Georges., James Mast de Maeght  pour sqon aide dans l'identification.
Et puis un grand merci à …. Marmara !!!!!!!!!!!!!!!
© 2010 P.Burnel