La maintenance des M'bunas (4)

* Le choix des espèces :

Comme nous l'avons dit plus haut, le choix des espèces est grand, et même de plus en plus grand. Tout d'abord, et même si ce n'est pas très diplomatique, nous devons vous encourager à bien sélectionner votre commerçant. Il faut bien admettre que les commerçants qui savent ce qu'ils vendent sont, en proportion, assez rares. On trouve souvent dans les commerces aquariophiles "communs" des M'bunas, le plus souvent issus des élevages du Sud-Est asiatique, qui n'ont aucun rapport avec les souches sauvages, de plus les hybrides sont de plus en plus fréquents (y compris chez certains grossistes belges). Il convient donc de savoir exactement ce qu'on achète ; si un poisson vous paraît mignon mais si le commerçant ne peut pas vous dire avec exactitude et certitude ce que c'est, mieux vaudra vous abstenir.

Le choix du commerçant étant fait (et vous devrez peut-être faire quelques dizaines, voire centaines de kilomètres pour aller lui rendre visite), il faudra faire le choix des espèces. Bien sûr, ce choix dépendra de ce qui sera disponible à ce moment, mais il ne faudra pas vous "jeter sur tout ce qui bouge", car tous les M'bunas ne vivent pas en bonne entente. Déjà, vous retirez de votre choix Genyochromis mento (un mangeur d'écailles et de nageoires, que vous avez d'ailleurs bien peu de chances de rencontrer), pour des raisons évidentes, et pratiquement toutes les espèces de Petrotilapia si votre bac n'a pas les dimensions d'une petite piscine (à moins de n'acheter qu'un mâle).

Ensuite, vous vous abstiendrez d'acheter des espèces proches les unes des autres, par exemple des Melanochromis johannii et des Pseudotropheus saulosi, car les femelles sont relativement semblables, et il convient de ne pas trop jouer avec le feu de l'hybridation. Cet exemple est pris volontairement pour montrer que même placées dans deux genres différents, deux espèces peuvent être assez proches (en couleur). Il est évident que le problème sera accentué si on prend des espèces appartenant au même genre, voire au même groupe (par exemple, toutes les espèces du complexe "zebra", soit, outre Maylandia zebra lui-même, M. greshakei, M. callainos, M. estherae, M. sp."zebra chilumba", etc.) Mais des espèces distinctes appartenant au même genre, ou à des genres proches, peuvent parfaitement cohabiter si leur aspect est différent. On pourra ainsi maintenir des Pseudotropheus elongatus, M. zebra et Tropheops. Bien entendu la cohabitation de variétés géographiques d'une même espèces est à proscrire dans tous les cas.
 
 

Pseudotropheus sp "Elongatus Chewere"
En règles générale, et pour éviter tout risque d'hybridation, il faut toujours éviter de maintenir un sujet solitaire. Si c'est une femelle, l'hybridation est évidente si vous la trouvez en incubation pendant plus de 24 heures, mais si c'est un mâle dominant, comment savoir s'il n'a pas frayé avec une femelle dont le mâle s'est fait malmener ?
Les bourses ou petites annonces de l'AFC sont souvent un bon moyen de se procurer des poissons, toutefois il convient de rappeler qu'il est bon de croiser des souches d'origines différentes de façon à éviter les dégénérescences génétiques dues à une consanguinité trop poussée. Il est assez aisé d'acheter 4 ou 5 jeunes sujets chez deux vendeurs distincts et de garder les femelles de l'un et les mâles de l'autre. Bien entendu il ne faut pas les faire grandir dans le même bac, sinon il serait impossible de les reconnaître !

 
 

Maylandia estherae
Maylandia sp "Black Dorsal Nkolongwe"
Maylandia sp "Zebra Chilumba"

* Introduction de nouveaux sujets :

Il convient de signaler tout d'abord que toute introduction de poisson doit être précédée d'une période de quarantaine, qui permet d'une part de vérifier que les poissons sont sains, et d'autre part, de les acclimater à la nourriture qui leur sera distribuée et par conséquent de n'introduire des poissons ni stressés, ni amaigris.

Si l'introduction d'un groupe de M'bunas adultes ou subadultes dans un aquarium non peuplé ne pose que très peu de problèmes, il en va tout autrement lorsque le bac est déjà peuplé. En effet, tout poisson jouit, partiellement ou pleinement, d'un territoire, l'ensemble de ces territoires n'ayant pour limites que les vitres du bac ; tout nouveau venu devra donc s'octroyer un territoire ou, tout au moins, un espace de refuge, aux dépens de sujets plus anciens qui ne se laisseront pas forcément faire. En conséquence on peut estimer que l'introduction de poissons adultes dans un bac peuplé est vouée à l'échec, dans 90% des cas, sauf s'il s'agit d'une espèce suffisamment distincte de celles déjà en place, et ne constituant pas une menace pour ces dernières : un Labidochromis, peu apte à bouleverser la hiérarchie, ne se trouvera généralement guère molesté par les Pseudotropheus déjà présents dans le bac, surtout si le volume de celui-ci ne descend pas en dessous d'un minimum de 300 litres. Certaines espèces particulièrement agressives peuvent s'accommoder d'une introduction tardive lorsqu'elles sont capables de s'imposer d'emblée aux dominants déjà en place. L'entreprise est hasardeuse, compte tenu du fait que les individus en place sont toujours beaucoup plus combatifs que les intrus, et qu'en cas d'échec, la sanction peut être à la mesure de l'outrage : un individu qui a tenté sérieusement de remettre en cause la hiérarchie à son introduction mettra particulièrement longtemps à se faire accepter (s'il n'est pas mis à mort), ses adversaires ayant eu tout le loisir de réaliser l'importance de la menace qu'il représente pour eux.

C'est là que le savoir-faire de l'aquariophile intervient, et un "m'bunaphile" expérimenté se doit de connaître les réactions et les compatibilités des différents types de M'bunas, ainsi que les moyens d'action pour enrayer les montées de violence. Une solution fréquemment adoptée est de détruire entièrement le décor et de le reconstruire de façon radicalement différente après l'introduction des nouveaux. Ainsi, chaque poisson devra reconstituer son propre territoire, les nouveaux s'intégrant parfaitement dans cette stratégie.. Il va de soi que les décors fixes ne sont pas compatibles avec cette méthode. Une autre solution est alors d'intégrer des briques ou tuyaux suspendus dans les angles du bac (Voir l'article) Les M'bunas étant des poissons assez prolifiques il est parfois nécessaire de retirer le surplus de jeunes présents dans le bac, la seule solution efficace et rapide pour cela est de retirer l'ensemble du décor, cela peut être une bonne occasion pour introduire de nouveaux venus.

Une autre solution consiste à introduire de jeunes sujets. Ceux-ci ne seront pas considérés par leurs aînés comme des concurrents potentiels et, après quelques courses-poursuites réglementaires et inévitables, ils trouveront facilement refuge dans des interstices d'où ils ne pourront être délogés, et pourront progressivement trouver leur place au sein du groupe. Cette intégration se réalisant au fur et à mesure de la croissance des poissons, elle se fait sans douleur. Cette méthode convient parfaitement pour de jeunes sujets jusqu'à 6-7 cm, avant la maturité sexuelle, et donc avant la coloration du mâle.

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