Les Cichlidés du lac Tanganyika 
B - Les Lamprologiens

C'est en 1986 que Max Poll a classé les Cichlidés du Tanganyika en 12 Tribus distinctes.

Dans celle des LAMPROLOGINI il réunit un certain nombre de genres regroupant des espèces pondeuses sur substrat (d'autres espèces, également pondeuses sur substrat, sont intégrées à la tribu des TILAPIINI). Bien évidemment ce comportement reproducteur n'est pas le seul motif d'unification mais les autres caractères sont de peu d'intérêt pour l'aquariophile.

Sous le terme "Lamprologien" on regroupe les espèces de "Lamprologus" (au sens large) et les genres Julidochromis, Chalinochromis et Telmatochromis. Les Lamprologiens présentent une assez grande variété, tant morphologique que comportementale.

C'est souvent avec ces espèces que les cichlidophiles font leurs premières armes dans la maintenance des poissons du lac. Cela semble tout à fait justifié puisqu'un grand nombre se reproduisent facilement, et sont donc facilement disponibles sur le marché. Elles sont également assez tolérantes quant à leurs conditions de maintenance. Cela ne signifie pas qu'il ne s'agit que de poissons "pour débutants". Certaines espèces sont difficiles et toutes sont très intéressantes.

1/"Lamprologus"(au sens large)

Le genre Lamprologus a été révisé en 1985 par Colombe & Allgayer puis en 1986 par Max Poll. Les genres Neolamprologus, Paleolamprologus, Variabilichromis, Lepidiolamprologus puis Altolamprologus ont alors été créés ou réhabilités.

Selon les différentes "écoles" le genre Lamprologus est restreint à quatre espèces fluviatiles du Zaïre (dont la plus connue pour l'aquariophilie est L. congoensis) ou étendu à une dizaine d'espèces lacustres. Le caractère le plus visible pour l'aquariophile permettant de différencier ces espèces des Neolamprologus est la présence de pelviennes arrondies avec les 2ème et 3ème rayons plus allongés (Chez les Neolamprologus le 1er rayon est plus long).

Toutefois il convient de maintenant réviser ces données pour cela reportez vous à "Nouveautés systématiques"

Pour la plupart ces espèces sont des espèces conchylicoles (prononcer conKilicole), c'est à dire qu'elles occupent des coquilles d'escargot (Neothauma tanganyicense, Pila ovata).
 
L'espèce la mieux connue est certainement L. ocellatus au caractère bien affirmé n'hésitant pas à tenir tête à des poissons beaucoup plus gros pour défendre son territoire. On ne se lasse pas de l'observer enterrer sa coquille ne laissant que l'ouverture apparente au sommet d'un monticule de sable. Assez facile à maintenir et à faire reproduire cette espèce ne laissera jamais indifférent l'aquariophile, même le plus blasé.

Le genre Neolamprologus regroupe près d'une cinquantaine d'espèces, c'est donc le genre de Cichlidés du lac le plus important par le nombre d'espèces.

Il s'agit d'un genre fort hétérogène qu'il est possible de scinder en plusieurs groupes plus ou moins bien définis : les conchylicoles (auxquels on peut intégrer certaines espèces de "Lamprologus"), le groupe "Brichardi", le groupe des "cylindriques". Cela semble bien simple mais en fait c'est beaucoup plus complexe qu'il n'y paraît et certaines espèces constituent la liaison entre des groupes (voire des genres) différents.

N. brichardi est certainement l'espèce la mieux connue de son groupe. C'est un poisson extrêmement gracieux au comportement intéressant. Une fois le couple formé les pontes se succèdent, les alevins sont d'abord gardés par les parents puis, au fur et à mesure que les jeunes grandissent ils s'occupent à leur tour de leurs petits frères et sœurs . On a ainsi rapidement une colonie importante qui envahit tout l'aquarium. Malgré leur taille relativement modeste, ils sont capables de faire face à n'importe quel intrus, quelle que soit sa taille.
 
Neolamprologus brichardi  "Rutunga" Neolamprologus pulcher "Daffodil"

Parmi les lamprologues cylindriques N. leleupi à la coloration jaune doré, parfois orange est particulièrement remarquable. Il s'agit d'un poisson au comportement interspécifique assez bon. Les couples ne surveillent leur progéniture que pendant une dizaine de jours, jusqu'à ce qu'ils puissent se débrouiller seuls. En fait, en bac communautaire, peu d'alevins survivent. Le mâle ne s'occupe que très peu des jeunes, cette tâche étant assurée essentiellement par la femelle, le mâle préférant allez voir si une autre femelle ne serait pas également disposée à le satisfaire; ce comportement est très fréquent chez les Lamprologues.
 

Neolamprologus leleupi "Black Throat "(Tembwe ?) Neolamprologus nigriventris
N. tretocephalus (à droite) est un poisson plus grand (15cm) à la belle coloration bleu pâle marquée de 5 barres verticales noires, il ressemble un peu à Cyphotilapia frontosa. C'est un poisson qui peut être assez agressif et, compte tenu de sa taille, il ne doit pas être maintenu avec des poissons trop petits. Ils pondent généralement sous une roche. Une espèce proche, N. sexfasciatus présente une barre supplémentaire. Il existe deux formes jaunâtres, au sud Zaïre et sud Tanzanie et une forme bleue en Zambie. Cette dernière forme constitue une énigme puisqu'elle n'a toujours pas été reproduite en captivité.
N. multifasciatus est le plus petit Cichlidé du lac. C'est une espèce conchylicole vivant en groupe. Une espèce proche N. similis se caractérise par un oeil plus grand et, ce qui est plus facile à voir, la première barre verticale présente sur la tête (en arrière de la tête chez N. multifasciatus). N. multifasciatus pond discrètement dans les coquilles, les alevins sont peu nombreux mais, après quelques reproductions, on obtient un groupe bien structuré qui sera passionnant à observer.

N. buescheri a acquis très rapidement un grand renom parmi les cichlidophiles. Sa taille modérée (10cm), son corps fusiforme, son patron de coloration beige marqué de bandes mélaniques brunes, ses fins liserés bleus et sa caudale en lyre en ont fait un hôte de choix des aquariums. Il est également doté d'un caractère certain qui lui permet, malgré sa taille modeste, de cohabiter avec des poissons plus gros ou plus agressifs. Plusieurs populations réparties en Zambie et au sud Zaïre se différencient essentiellement par les bandes (horizontales) et barres (verticales) plus ou moins marquées. La reproduction, sans être réellement aisée, ne pose pas de problèmes véritablement insurmontables. Comme toutes les autres espèces de la tribu, les jeunes doivent être démarrés aux nauplies d'artémias.

Lors de leur révision de 1985, Colombe et Allgayer avaient créé deux genres monotypiques pour deux espèces bien différenciées (Paleolamprologus toae et Variabilichromis moorii) qui furent ensuite replacées par Poll dans les Neolamprologus.

Le genre Altolamprologus ne compte que deux espèces : A. compressiceps et A. calvus. Elles se caractérisent par un corps fortement comprimé latéralement et un grand nombre d'épines anales (X-XIII) ce dernier caractère étant approché par N. fasciatus. Une troisième "espèce" est connue des aquariophiles sous le nom de Altolamprologus sp. "Sumbu", certaines études récentes tendent à montrer que cette espèce de petite taille ne serait qu'une forme naine de A. compressiceps qui aurait adapté sa taille à un biotope particulier, les lits de coquilles vides. Le cas est également observé chez Lamprologus callipterus et Neolamprologus mondabu (Gashagaza et al., 1995 - Finley, 1996)

Bien qu'il ne s'agisse pas d'espèces particulièrement colorées, les Altolamprologus jouissent d'une grande popularité auprès des cichlidophiles, ceci semble dû essentiellement à leur forme très particulière. Si A. compressiceps est réparti dans tout le lac et présente de nombreuses formes chromatiques, A. calvus ne se rencontre que dans le sud sous trois formes différentes : noire (le plus courant), blanc ou jaune. Le gros défaut des Altolamprologus est certainement leur croissance extrêmement lente et il n'est pas rare de devoir attendre un an avant de pouvoir distribuer des jeunes à une taille (à peu près) correcte. Leur reproduction ne pose guère de problèmes. En milieu naturel ils pondent dans des failles dans lesquelles les femelles se cachent et qu'elles obstruent de leur corps pour protéger œufs et larves. En aquarium le meilleur succédané à ces failles est constitué par des coquilles de gastéropodes marins dont l'ouverture forme une fine fente (plutôt que celles formant un trou plus ou moins rond). En principe le mâle, nettement plus gros, ne pénètre pas à l'intérieur mais dans le cas de très grosses coquilles les deux partenaires peuvent y entrer, la femelle pénétrant beaucoup plus profondément. La ponte est remarquée quand la femelle n'est plus observée dans l'aquarium. Il suffit, 10 jours plus tard, de retirer la coquille et d'en extraire une partie des larves pour en effectuer l'élevage;

Altolamprologus compressiceps "Burundi"

Le genre Lepidiolamprologus comporte des espèces prédatrices de taille souvent assez importante. Il s'agit d'espèces au corps fusiforme dont certaines peuvent atteindre une trentaine de centimètres. L'espèce la plus couramment rencontrée en aquariophilie, car certainement la plus belle, est L. nkambae qui pourrait n'être qu'une variété de L kendalli. Cette espèce allie beauté et comportement tout à fait pacifique, elle constitue donc un hôte de choix pour un bac Tanganyika de bonne taille. D'une manière générale les Lepidiolamprologus ne seront maintenus qu'avec des espèces de taille conséquente, ne risquant pas de servir de repas ! Depuis l'étude de M. Stiassny, on a également intégré qu genre quelques espèces plus ou moins conchylicoles du groupe de L. boulengeri
 
 
Lepidiolamprologus elongatus Lepidiolamprologus boulengeri

2/ Julidochromis et Chalinochromis

Peut-on encore présenter les Julidochromis? Quel est l'aquariophile qui ne les connaît pas? Fréquemment rencontrés dans le commerce aquariophile, ils sont souvent l'occasion pour certains de se "faire la main" avant de passer à des espèces plus difficiles soit dans la maintenance, soit dans la reproduction. Il est vrai que les "Julidos" sont faciles à faire reproduire, un peu trop parfois, et vite encombrants. Ils sont aussi souvent l'occasion de déboires pour le débutant. En effet combien de fois ai-je entendu des jeunes dire " J'ai acheté 5 Julis, il y en a un qui est mort après s'être fait cartonner, deux sont collés à la surface, pour les deux derniers ça baigne! Que dois-je faire pour sauver les deux candidats à la mort? ". Les retirer bien sûr! Démarrer avec 5 ou 6 sujets c'est très bien, un couple peut se former mais il faut savoir que un couple formé supportera très difficilement la présence de congénères, même dans un grand bac (ou alors très grand!). Il faut donc en faire profiter vos amis. Mais une fois le couple formé attendez-vous à voir un jour ou l'autre une multitude d'alevins envahir votre bac, collés au substrat, cachés dans la moindre faille, attentivement surveillés par leurs parents ils ne pourront être chassés par les prédateurs et envahiront assez rapidement le bac.

On peut scinder le genre en deux groupes :

a/ Les grands Julidochromis (J. marlieri, J. regani) peuvent atteindre une quinzaine de centimètres. Il peut parfois être assez difficile de déterminer à quelle espèce appartiennent certaines populations, en effet, il existe dans le lac un grand nombre de formes plus ou moins intermédiaires entre les deux populations "type". La population de J. regani de Kipili, en Tanzanie, est particulièrement recherchée en raison de sa très belle coloration jaune doré.

b/ Les petits Julidochromis (J. transcriptus, J. ornatus, J. dickfeldi) ne mesurent guère plus de huit centimètres. Ils pourront être hébergés dans un bac d'une centaine de litres pour un couple. Il est toujours proscrit de maintenir dans le même aquarium plusieurs espèces de Julidochromis en raison des risques d'hybridation. De même on veillera à maintenir ensemble des sujets issus des mêmes populations géographiques de façon à éviter de créer de nouvelles "formes".

   Julidochromis "transcriptus Gombi"

c/ Le genre Chalinochromis est proche des Julidochromis. Il ne présente actuellement que deux espèces décrites : C. brichardi et C. popelini. Deux autres "espèces" sont également connues : C. sp. "ndobhoi" et C. sp. "bifrenatus". La maintenance est identique à celle des "Julidos" mais ils sont, à long terme, nettement moins envahissants.

Chalinochromis  "Ndobhoi"

3/Telmatochromis

Ce genre comporte deux groupes d'espèces :

a/ Groupe "élancé" au corps fusiforme de couleur beige et marqué de bandes longitudinales sombres. Quatre espèces décrites : T. bifrenatus, T. brichardi, T. burgeoni, T. vittatus et une espèce non décrite : T. sp. "vittatus shell". Ces poissons sont tout à fait adaptés à des bacs de taille modeste, leur comportement est excellent et leur taille réduite (8/10 cm).

b/ Groupe "trapu" au corps plus massif que celui des précédents et de couleur souvent plutôt sombre. Deux espèces décrites : T. dhonti (autrefois connu sous le nom de T. caninus) et T. temporalis. Une espèce non décrite (T. sp. "temporalis shell") est rencontrée fréquemment sous le nom de "T. burgeoni", il s'agit d'une fausse identification, le "vrai burgeoni" ne semble pas avoir encore été exporté.

Il est possible que, comme pour les Altolamprologus nains précédemment cités, les formes conchylicoles ("Vittatus Shell" et "Temporalis Shell") ne soient que des formes adaptées à un environnement particulier.

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